Elle observe la porte face à elle, poings qui se plient et se déplient sous l’effet de la nervosité ressentie. C’était idiot, pourtant. Rien ne l’obligeait à être présente, c’était elle qui avait décidé d’être là. Ophelia fait un pas en arrière, puis un autre. Elle n’avait pas pour habitude de demander de l’aide, surtout pas à un professeur, aussi sympathique pouvait-il sembler. Pourtant… Pourtant elle repense à Leo, Leo et ses mots. Elle repense aux forces qu’elle avait dépensé en essayant de prendre sur elle avant de s’effondrer dans les bras de Theodore, accablée par le poids de cette relation fraternelle qui n’en avait que le nom. Elle avait eu cette terrible impression que tout était terminé, que plus rien ne pourrait être réparé entre eux, quand bien même elle ne désirait rien de plus. Parce que l’américain était prête à tout, encore aujourd’hui, pour récupérer son frère. Elle pourrait tout abandonner pour revenir en arrière, quand ils ont été séparés, pour partir avec lui sans jamais se retourner. Mais c’était trop tard. Quelque chose avait été brisée ce soir-là. Ophelia s’en était voulue, ressassant encore et encore les mots qu’elle avait utilisé, ce sort de trop qu’elle avait lancé et qui semblait avoir été ce qui avait déclenché la fin de tout entre eux. Seulement, après des journées passées à revoir chaque moment, la colère avait pris le pas sur la tristesse, brûlant tout sur son passage. Terminées les larmes s’échouant sur son oreiller quand ses camarades de dortoir dormaient, terminé le temps passé à chercher Leo du regard dans la grande salle dans l’espoir de l’apercevoir ne serait-ce qu’un instant. La colère avait gagné du terrain jour après jour jusqu’à régner en maîtresse absolue sur ses émotions. Elle était bien plus familière avec celle-ci, pour l’avoir dompté et géré depuis des années déjà, parvenant à la dissimuler sous une apparence impassible. Cette fois, pourtant, tout semble différent. Elle a l’impression qu’à chaque instant, le contrôle risque de lui échapper. Rien de ce qu’elle faisait habituellement pour gérer ses élans de colère ne parvenaient à l’apaiser, mots de sa moitié qui n’avaient de cesse de revenir de la heurter, nourrissant ses émotions les plus négatives un peu plus. A nouveau, son regard se porte sur la lourde porte en bois. Pas question de faire marche arrière. Quand elle frappe, il ne faut que quelques secondes avant qu’on ne l’invite à entrer. « Miss Wheeler ? J’espère que je ne vous dérange pas. » lance la vipère en pénétrant dans son bureau. Elle offre un léger sourire alors que sa main droite vient agripper sa cape, réflexe qui s’emparait d’elle dès qu’elle avait besoin d’un point d’ancrage pour ne pas laisser ses propres émotions l’envahir davantage. « Vous êtes sans doute très occupée mais je... » Les mots se bloquent alors qu’elle lève les yeux vers l’enseignante. Elle sait, Ophelia, que c’est sa fierté qui s’agite, elle qui s’efforce de se débrouiller seule la plupart du temps. Cette fois, pourtant, ça n’a pas marché et il fallait qu’elle prenne sur elle si elle voulait avancer. Jusqu’à présent, la professeure lui a toujours semblé être de bons conseils… Et le fait qu’elle soit une femme était probablement la raison pour laquelle elle se tournait vers elle, fait qui la rassurait davantage encore. « Vous m’aviez dit que vous pourriez m’aider si jamais j’avais besoin de me défouler. Et… J’en aurais besoin. Maintenant. » Et l’espoir qui revient, malgré elle, celui d’avoir enfin trouvé ce qui la soulagera après avoir passé des journées à maintenir à peine la tête hors de l’eau.

Occupée à préparer ses prochains cours aux huitièmes, Rachael apporte sa tasse de café brûlante jusqu’à ses lèvres et attire à elle un calepin et une plume d’un accio informulé, qu’elle ensorcèle de façon à qu’elle écrive tout ce qu’elle entend. « Note qu’il faut que je parle à Dumbledore de mon idée pour les jeunes, et que je dois aussi demander une dérogation au ministère. » Pensive, elle tire sur l’une de ses mèches rousses en songeant à ses projets de cours pour décembre, janvier et février. « Note aussi qu’il faut que je prépare le… » interrompue par des coups frappés à la porte, Ash fronce les sourcils, soupire et referme son calepin d’un coup sec, agacée d’être ainsi dérangée dans ses préparatifs. Un coup de baguette suffit à arranger son bureau et à fermer la porte menant à son espace personnel avant qu’elle n’autorise d’un « Entrez » son visiteur à pénétrer dans son antre. Auparavant assise à la chaise de son bureau, elle se relève et vient plutôt s’appuyer sur le devant de la première table dans une posture plus sérieuse et professorale, bras croisés sur sa poitrine. Ses cheveux prennent une teinte blonde par habitude mais quand elle voit apparaître la jeune Burgess, elle s’adoucit légèrement et quelques mèches rebelles reviennent se colorer de roux. La métamorphomage offre une simple esquisse de sourire à son élève et l’enjoint à s’approcher un peu plus d’un mouvement de tête. « Vous ne me dérangez pas Miss Burgess. » elle éloigne les doutes de son élève d’un geste de la main et fronce les sourcils devant son attitude. « Est-ce que tout va bien ? » par sa posture, sa façon de triturer sa cape et la façon dont les mots se bloquent dans sa gorge, Rachael – pour qui il a toujours été facile de cerner les gens – n’a pas de mal à comprendre que quelque chose ne va pas chez son élève et si elle semble se refuser à lui parler, sa professeure l’encourage pourtant d’un signe de la tête à poursuivre. Ophelia se confie davantage sur la raison de sa présence et alors, Ash pousse un soupir inaudible alors que ses sourcils se froncent à nouveau dans une expression indéchiffrable pour quiconque ne la connaîtrait pas. Mélange d’inquiétude et de compassion se bousculant en elle, elle hoche imperceptiblement la tête et se redresse. « Je vois. Attendez-moi un instant. » elle offre un simple sourire qui se veut réconfortant à son élève pour ne pas la faire fuir et se glisse dans la pièce voisine le temps de quelques instants pour y récupérer du matériel rangé dans une malle. Un sortilège de lévitation lancé sur celle-ci pour éviter à avoir à la porter, Ash ressort de la salle une minute plus tard où Ophelia, par chance, l’y attend toujours. « Suivez-moi, on serait trop à l’étroit ici. » elle laisse la vipère sortir la première, ferme son bureau d’un sortilège qui lui est propre et se dirige vers une salle de classe vide normalement utilisée pour toutes sortes d’entraînements. La pièce est vaste, insonorisée et meublée de quelques tatamis pour amortir d’éventuelles chutes et à tout ça vient s’ajouter la malle que Rachael dépose sur le sol. D’un « Collaporta » elle verrouille la porte avant de se tourner vers Ophelia. « C’est pour que nous ne soyons pas dérangées, mais si l’idée vous met mal-à-l’aise, vous n’avez qu’un mot à dire. » elle lui laisse le champ libre pour rouvrir la porte ou non et pendant ce temps, ouvre la malle magiquement agrandie dans laquelle se trouvent deux mannequins, deux punching-balls et des gants de boxe qu’elle sort et expose à la jeune fille, ainsi que quelques autres objets qu’elle décide de garder secret pour l’instant. « De quoi avez-vous besoin Ophelia ? » d’un coup de baguette, elle redresse les mannequins et met en place les punching-balls « De frapper ? Détruire ? Hurler ? » d’un nouveau coup de baguette, elle troc sa tenue élégante pour une tenue plus sportive. « Vous pouvez vous servir de vos poings, de votre baguette, ou de votre voix, rien ne sortira d’ici. » ses cheveux se transforment en une natte sur le côté d’un roux et blond mélangé. « Essayez une première fois, de la façon qui vous semble la plus naturelle possible et dites-moi ce que ça vous fait. » elle ne cherche pas à savoir le pourquoi du comment, Rachael, juge que son élève à autant besoin de son jardin intime qu’elle-même et pourtant, elle se tient prête en cas de besoin, et garde un œil concerné sur elle, prête à l’aider et à la diriger.

Il y a ce soupir de soulagement qui la quitte dès lors que l’enseignante accepte de l’aider, s’éclipsant après l’avoir invité à patienter. Elle n’avait pas douté qu’elle l’aiderait puisqu’elle avait été celle qui lui avait suggéré de venir la voir en cas de besoin, mais Ophelia était si peu habituée à demander de l’aide qu’elle avait craint une réponse négative. La professeure revient à peine quelques instants plus tard, l’incitant à sortir du bureau trop étroit pour qu’elles puissent y faire quoi que ce soit de véritablement efficace. La vipère sort du bureau, se dirigeant vers l’endroit indiqué. Ce qui aurait dû être une simple salle de classe était en réalité aménagée avec différents tatamis, transformant la salle en un endroit idéal pour s’entraîner. « Non ça ira comme ça, merci. » Ophelia lui offre un sourire, tout de même surprise et ravie qu’elle ait pris le temps de lui demander son avis. Elle fait quelques pas et observe les modifications apportées à la salle grâce aux objets installés qu’elle sort de sa malle. La question qu’elle lui pose la prend au dépourvu – pourtant, elle était là parce qu’elle avait bel et bien besoin de quelque chose, mais de quoi ? Elle n’y avait pas véritablement réfléchi alors qu’elle n’avait que ressenti l’envie d’expier cette colère qui continuait à la ronger depuis des jours déjà. Sa tenue est transformée en une tenue sportive, ce qui sera nettement plus pratique. Ophelia hoche la tête aux mots de l’enseignante, observant les différents choix qui s’offrent à elle avec intérêt. Finalement, elle fait quelques pas et s’empare des gants de boxe. « Je crois que j’ai envie de frapper. » Rien de sûr, cependant, mais elle était prête à tester ce qu’on lui proposait dans l’espoir de calmer la violence de ses émotions. Elle enfile les gants, drôle de sensation qu’elle éprouve alors qu’elle se positionne face à un punchingball. La vipère cherche Rachael du regard avant de reporter son attention sur le sac face à elle. Elle frappe une première fois, faisant encore preuve de cette retenue qu’on lui avait toujours demandé d’avoir. Elle tente une nouvelle fois, un peu plus fort cette fois. « C’est… Pas mal. Mais je ne suis pas sûre de m’y prendre correctement. » Ce n’était pas comme si elle usait de ses poings tous les jours, après tout. Écoutant avec attention les conseils de la sorcière, l’américaine se redresse et positionne un peu mieux ses jambes et ses bras. Cette fois, frapper est plus facile, au point qu’elle réitère le mouvement encore et encore jusqu’à en avoir le souffle couplé. « J’ai juste… Peu importe ce que je fais, ça ne sera jamais assez ! » Colère qui gronde alors, besoin d'extérioriser tout ce qu'elle contenait habituellement. Elle ne sera jamais assez. Elle ne sera jamais assez pour sa mère qui ne voit en elle qu’un moyen de remettre leur famille à flots sans se soucier de ce qu’elle pouvait bien désirer, sans se soucier des ambitions qu'elle pouvait bien nourrir. Elle ne sera jamais assez pour cette communauté dans laquelle elle sera considérée comme une sorcière de seconde zone, valant toujours moins que les sorciers. Elle n’était pas assez pour Leo. Pas assez pour qu’il reste, pas assez pour qu’il daigne répondre à ses lettres. Il ne l’aimait pas assez quand elle l’aimait encore de toutes ses forces en dépit de la froideur avec laquelle elle le traitait. Et si son propre jumeau ne parvenait pas à l’aimer suffisamment, alors elle savait déjà qu’elle ne sera jamais assez pour qui que ce soit, vipère épuisée par tous ces efforts qu’elle faisait constamment sans que rien ne change. Elle n’avait pas prévu de s’exprimer ainsi, Ophelia, mais les mots avaient débordé sans qu’elle ne puisse y faire quoi que ce soit – sans doute que frapper n’était pas suffisant, finalement. Ses bras retombent le long de son corps alors qu’elle se tourne à nouveau vers Rachael, désemparée. « Ce n’est pas assez. » dit-elle en désignant les gants. A moins que ce ne soit elle qui soit incapable de totalement lâcher ce contrôle qu’elle gardait sur ses sentiments alors même qu’elle était là pour ça.

« Alors allez-y, frappez » offre-t-elle pour seule réponse à l’étudiante lorsqu’elle exprime son désir de se défouler, tout en pointant le punching-ball du menton. Elle ne donne pas d’autres indications, aucune instruction particulière et se contente de reculer d’un pas pour la laisser faire les choses d’elle-même avant d’intervenir et lorsque la jeune Burgess cherche son regard, elle se contente d’un léger hochement de tête pour l’encourager à frapper. Bras croisés sur sa poitrine, Rachael regarde attentivement les gestes de son élève, remarquant immédiatement sa retenue et sa pudeur dans ce coup presque réservé qu’elle donne à l’objet. Fronçant les sourcils devant cette attitude qu’elle avait déjà remarqué chez sa jeune protégée, la métamorphomage ne vient pourtant pas interrompre l’exercice et continue de laisser à Ophelia le temps de s’acclimater à celui-ci. Deuxième coup. C’est mieux, mais pas encore satisfaisant aux yeux de Rachael qui comprend combien Ophelia a besoin de plus et combien elle n’ira pas mieux tant qu’elle ne déversera pas toute sa frustration dans ses coups. Alors qu’elle l’interroge du regard pour savoir comment elle se sent après ces deux premiers coups, elle hoche la tête et lui offre un sourire lorsqu’elle requiert son aide. « Regardez, placez plutôt vos pieds comme ça, et vos mains là. Ne soyez pas trop raide » alors qu’elle lui donne d’autres conseils, elle lui montre les postures et, avec son autorisation, replace ses bras et ses jambes quand elle ne semble pas y arriver d’elle-même. Ceci fait, elle lui offre cette fois un sourire d’encouragement et recule d’un pas pour mieux l’observer recommencer à frapper le punching-ball, une fois, puis deux, puis tant de fois qu’elle ne peut même plus les compter. Si elle oscille entre fierté et inquiétude et qu’elle ne sait pas à quelle émotion accorder le plus d’importance, elle se rend compte qu’un léger sourire s’est dessiné sur ses lèvres devant les progrès immédiat de son élève. Pourtant, ce sourire s’affaisse sitôt qu’Ophelia lui offre cette confession inattendue, créant la confusion chez Rachael dont les yeux prennent brièvement une teinte orangée. Sourcils froncés, bras croisés sur sa poitrine, posture plus ou moins tendue, elle n’ose interrompre son élève dans ses mouvements et se contente de l’observer toutes ses émotions dans des coups de plus en plus forts. Une part d’elle est intriguée, une autre est touchée, si elle n’a pas l’intention de tirer les vers du nez de son élève, elle reste tout de même concernée par son état et elle ne peut pas s’empêcher de blâmer quiconque serait à l’origine de ce mal-être ; nul ne devrait jamais se sentir comme pas assez. Alors qu’enfin Ophelia se tourne vers elle, Ash décroise ses bras et s’avance d’un pas vers elle pour lui donner une bouteille d’eau. Elle n’a pas besoin de poser la question, la vipère lui répond aussitôt que ce n’est pas assez et amène sa professeur à faire quelques pas dans la pièce dans un signe de réflexion. « Je ne suis pas sûre que ce que j’ai prévu vous suffise. » elle marque une pause, regarde Ophelia, puis reprend. « Du moins pas maintenant, mais j’ai une autre idée. » elle continue de réfléchir en se rapprochant à nouveau de l’élève. « Gardez-les » dit-elle en désignant les gants de boxe avant de commencer à enfiler une paire elle aussi. « Je tiens à vous prévenir que je connais peu la technique dont je vais vous parler, j’ai pu l’essayer à quelques reprises au cours de mes voyages, mais je n’en suis pas une experte » d’un coup de baguette magique, elle relève un nouveau mannequin pour qu’il se dresse face à elles. « Je vous rassure, ça n’a rien de dangereux et si l’idée ne vous plaît pas, vous pouvez arrêter à tout moment. » elle capture son regard pour s’assurer qu’elle comprenne bien ses mots puis invite Ophelia à se placer devant elle et à se tenir droite. « C’est un exercice difficile, pour vous comme pour moi parce que nous allons devoir faire appel à notre magie la plus profonde et instinctive. » elle se redresse elle aussi, détend ses épaules et ancre son regard à celui d’Ophelia. « Deux questions avant de commencer ; avez-vous déjà pu expérimenter la magie sans baguette ? » elle marque une pause le temps de la laisser répondre, puis reprend. « Et est-ce que vous avez déjà médité ? Par le yoga ou bien de simples exercices de respiration. » là encore, elle lui laisse le temps de répondre puis lui adresse un petit sourire pour l’encourager. « Bien, c’est là que nous commençons, fermez les yeux si vous voulez, ça vous aidera. » elle, préfère les garder ouverts le temps de son explication, principalement pour pouvoir avoir un œil sur les réactions de son élève et s’assurer qu’aucun malaise ne vienne perturber leur séance. « La première étape, c’est d’imaginer vos émotions négatives. Imaginez les… comme un nœuds de plusieurs fils qui représenteraient chacun une émotion dont vous voulez vous débarrasser ! » en même temps qu’elle prononce ces mots, elle met elle-même ses consignes à exécution, imaginant une énorme pelote de laine avec sa colère, sa frustration, ses doutes et ses peurs et tout un tas d’autres émotions qu’elle voudrait oublier. « Vous n’y êtes pas obligée mais si ça peut vous aider à mieux visualiser, vous pouvez énoncer vos émotions à voix haute, donner une couleur, une forme ou une taille à ces fils et ces nœuds » sa colère est noire, sa frustration est rouge, ses peurs et ses doutes forment un bleu-gris. « Sans jamais perdre vos émotions, pensez à votre magie, celle qui est en vous et qui fait de vous la sorcière que vous êtes. Visualisez là aussi, plus grosse et plus forte que les nœuds. Donnez-lui une couleur, une identité, sentez comme la magie coule dans chacune de vos veines et sentez là vibrer dans chaque fibre de votre corps. » c’est une expérience presque indescriptible et quelque part, Rachael n’est pas sûre d’être très claire. Alors, elle marque une pause, prend une profonde inspiration, puis une seconde et bois une gorgée d’eau avant de reprendre. « Prenez votre temps, et dites-moi quand vous aurez l’impression de voir aussi bien vos émotions que votre magie. » et après ça, et seulement après, elles pourraient enfin passer aux choses sérieuses pour se libérer de sa colère.

Elle ne savait pas véritablement à quoi s’attendre Ophelia en arrivant ainsi dans le bureau de l’enseignante mais elle savait, en tout cas, qu’elle ne pouvait plus continuer en se contentant d’étouffer sa colère et sa frustration. Elle n’y parvenait plus, même malgré tous les efforts qu’elle pouvait faire en ce sens. La vipère suit les conseils de Rachael et si elle s’efforce d’obtempérer, elle réalise bien rapidement que les efforts fournis ne suffisent pas à apaiser la tornade qu’était la sienne. Elle n’en est pas réellement étonnée parce que ça avait toujours été comme ça avec elle, que ses émotions ont toujours été compliquées à gérer et que sa relation avec Leo était devenue suffisamment chaotique pour mettre à mal tout le contrôle qu’elle pouvait encore avoir. Intriguée par les mots de l’enseignante, la sorcière hoche la tête. Elle ignorait ce qu’elle allait lui proposer mais elle était prête à tout essayer pour calmer, même temporairement, tout ce qu’elle éprouvait depuis quelques jours. Elle se redresse pour se tenir droite suivant ses conseils tout en étant la plus réceptive possible. « C’est déjà arrivé. Enfin.. C’est surtout arrivé quand j’éprouvais des émotions trop fortes, c’était pas vraiment contrôlé. » Il faut dire que la brune n’avait jamais véritablement essayé de s’entraîner à cette exercice, attention déjà focalisée sur de trop nombreux éléments pour qu’elle s’accorde le temps nécessaire à cette expérimentation. Elle ne doute pas que ce serait pourtant positif et savoir que Rachael veut avoir recourt à cette forme de magie ne faisait qu’attiser sa curiosité. Elle secoue la tête négativement. « Non pas vraiment. En général, je vais plutôt vers des exercices plus physiques pour me dépenser. J’ai jamais essayé la méditation. » Et peut-être qu’Ophelia avait eu tort. Peut-être que c’était ce dont elle avait besoin pour apaiser les troubles la malmenant alors. Suivant les consignes de la sorcière face à elle, la Burgess ferme les yeux tout en tentant cette exercice de visualisation proposée. Elle met quelques instants à véritablement visualiser ces nœuds évoqués, restant silencieuse alors que l’enseignante termine ses explications. Par réflexe, la sorcière serre les poings avant de prendre une profonde inspiration et de laisser ses mains appuyées contre ses cuisses. « Je les vois. Je crois. » C’était étrange comme sensation que d’ainsi parvenir à voir ses émotions et sa magie, comme si tout ce qui lui avait toujours semblé si abstrait s’avérait finalement être bien concret, sous ses yeux. « C’est comme… Comme une pelote. Il y a d’abord la colère, en rouge, qui semble être la plus présente et qui entoure le reste. Mais en dessous… il y a la frustration en gris, elle est plus fine mais elle semble relier tous les différents fils. Il y a la jalousie, aussi, en vert et… Et au centre, la peur en bleu. » La colère qui était sa façon de gérer face à ces émotions si variées qu’elle ne se donnait pas le droit de ressentir. La frustration, celle de ne pas pouvoir agir comme elle le désire véritablement constamment. La jalousie dès lors qu’elle aperçoit Leo riant aux éclats avec d’autres quand entre eux, il n’y a que des cendres fumant d’une relation qu’elle n’aura jamais eu. Mais, au centre de tout, c’est bien cette peur qui règne et qui fait vibrer chacune des autres émotions, la peur de n’être jamais assez bien, la peur d’être coincée dans ce rôle d’épouse réservée à toutes les sorcières de ce rang mais, avant toute chose, la peur de ne plus jamais retrouver sa moitié. Sa magie qui se manifeste et vibre en elle, en chaque partie de son corps, plus fort encore quand ses émotions tentent de prendre le dessus. « Je ressens ma magie elle… Elle vibre toujours plus fort quand je suis en colère. » Ophelia ignorait si l’information était pertinente même si elle se doutait que cela n’avait rien d’étonnant. Bien souvent, enfant, les premières manifestations de la magie se font sous le coup d’une émotion forte, après tout. « Qu’est-ce que je dois en faire, maintenant ? » Yeux qu’elle garde fermés, elle tente de conserver en tête cette image si particulière de ses émotions et ces drôles de sensations qui l’envahissent alors que magie et émotions vibrent en elle.

Une nouvelle excitation particulière parcourt le corps de Rachael en même temps que ses méninges s’activent et qu’elle songe à un exercice qu’elle aimerait faire faire à Ophelia. Elle sait que c’est délicat, même pour elle, parce que l’objectif est de faire appel à leur magie la plus pure et la plus instinctive, mais elle est persuadée que cette pratique pourra apporter à son élève un début de sérénité et le défoulement qu’elle recherche. Pour mener à bien son exercice, Ash commence par poser à son élève une série de questions, hochant la tête d’un air concentré aux réponses de celle-ci, esquissant parfois un sourire. « La méditation ne marche pas avec tout le monde, mais elle peut être un outils pour d’autres exercices, comme celui que nous nous apprêtons à faire » lâche-t-elle dans un sourire pour éloigner toute trace d’une éventuelle culpabilité avant de prendre un air concentré et de s’appliquer à lui expliquer les premières consignes tout en les appliquant pour elle-même également, une pratique difficile, mais nécessaire pour mener à bien le reste de cet exercice, elle en est consciente et c’est pourquoi elle reste silencieuse un long moment, le temps pour son élève d’aller à son rythme et de réussir à visualiser ses émotions avec précisions. « Vous vous en sortez très bien Ophelia » souffle-t-elle avec douceur pour l’encourager, mettant de côté le nom de famille pour une touche plus personnelle par la façon dont elle utilise son prénom. Touchée et bousculée par ses confessions et les explications de ses émotions, elle prend une profonde inspiration et garde l’œil vissé sur elle. « Ne perdez pas de vue la pelote, gardez-là bien en vue dans un coin de votre esprit et renforcez là à l’aide de vos souvenirs. » Rachael, elle, pense à l’accident, à la dernière fois qu’elle a vu Connor, à toutes les fois où on l’a sous-estimée parce qu’elle était une femme, aux fois où elle a eu peur de ne jamais remarcher correctement après son accident. Avec tous ces souvenirs, elle renforce sa pelote d’émotions et la rend plus forte, plus réelle et vivante. A elle se mêle la magie par les nouvelles consignes qu’elle donne à Ophelia et qu’elle applique à elle-même. « Excellent, gardez cette sensation de vibration, accrochez-vous-y. » elle ouvre un œil pour observer les réactions de son élève et remue ses propres doigts pour ressentir sa magie. « Sentez comme cette vibration parcourt tout votre corps, sentez là dans le haut de votre crâne, puis se diffuser dans votre cou jusqu’à votre cœur. Profitez de la façon dont cette sensation se répand dans les muscles de vos bras et qui descend jusqu’à votre bassin puis jusque dans la pointe de vos orteils. Vous pouvez contrôler cette vibration, ce n’est que votre magie dans son état le plus naturel, observez-là se diffuser dans chacun de vos membres. » à mesure qu’elle parle, elle expérimente la même chose et sent des picotements dans ses tempes, puis dans sa nuque, dans sa cage thoracique, dans ses avant-bras et dans ses cuisses, puis jusque dans ses orteils. C’est comme si une boule d’énergie circulait dans chacun de ses nerfs au gré de ses envies. Elle esquisse un sourire malgré elle, parce qu’elle se sent puissante, Rachael, et qu’elle apprécie la sensation de sentir la magie qui l’habite. « Dites-moi comment vous vous sentez maintenant que vous avez pleinement conscience de la force de vos émotions et de votre magie combinés ? » elle rouvre les yeux la première, fin prête à poursuivre l’exercice mais laisse un petit temps de silence s’installer avant de reprendre ses explications, de quoi laisser l’occasion à la vipère de profiter des sensations que lui offrent cette expérience, mais aussi de garder sa concentration intacte. « Bien. Quand vous serez prête, vous pourrez rouvrir les yeux » elle croise ses mains derrière son dos et attend patiemment que sa jeune apprentie rouvre les yeux. « Nous passons à la partie la plus délicate maintenant. » lâche-t-elle dans un début de sourire avant d’attirer deux punchingball d’un geste de baguette magique. « Avant de poursuivre, je tiens à vous rappeler que cette pratique n’est pas commune en Angleterre, nous avons l’habitude d’user de notre baguette comme d’une béquille donc vous devrez déconstruire tout ce que vous savez depuis que vous apprenez à faire de la magie. Nous avons déjà entamé ce processus en vous reconnectant au noyau magique de votre corps, mais le reste ne dépend que de vous. » elle marque une pause pour offrir un regard aussi réconfortant que sûr à Ophelia. « Ce que je veux dire, c'est qu'il n’y a pas de bonne ou mauvaise manière de le faire, suivez votre instinct et écoutez seulement votre corps et votre magie, elle fait partie de vous, elle est vous. » elle se met en position devant son propre punchingball à quelques mètres d’Ophelia de façon à ce qu’elles ne se blessent pas mutuellement par la force de leur magie en cas de perte de contrôle et veille même à installer un charme protecteur invisible entre elles ainsi que des matelas derrière la plus jeune pour la retenir au cas où elle tomberait si elle relâchait une quantité trop importante d’énergie d’un seul coup. Elle se met ensuite en position devant son punching-ball, la même qu’elle a montré à Ophelia quelques minutes plus tôt, puis l’invite d’un geste de la tête à faire comme elle. « Vous êtes toujours concentrée sur votre pelote d’émotions ? » regard entendu à la vipère, elle achève ses consignes. « J’espère que mes explications ne vous paraîtront pas trop brouillées, c’est un processus difficile à expliquer. » elle plaisante et va même jusqu’à lui offrir un clin d’œil avant de reprendre son sérieux. « Gardez votre attention focalisée sur votre noyau d’énergie magique, observez le grandir à la seule force de votre volonté et imaginez-le se confondre avec votre noyau d’émotions. Ensuite, quand vous vous sentirez prête, frappez le mannequin devant vous. » - « Avant l’impact, pensez avec conviction à ce noyau mêlant émotions et magie se répandre dans vos mains pour qu’au moment de frapper, vous relâchiez une vague d’énergie plus ou moins puissante. Ce ne sera peut-être pas suffisant pour vous de ne frapper qu’une fois parce que vous portez un poids bien trop lourd sur vos épaules, mais à chaque coup de poing, ce poids devrait s’alléger. » elle lui offre un regard compatissant qui se veut encourageant, alors qu’elle achève de fermer son gant de boxe, prête à frapper son propre punching-ball. « Si ça peut vous aider, imaginez qu’à chaque impact, c’est une émotion en particulier dont vous vous libérez et un fil qui se dénoue du nœud. » d’un geste de la main, elle lui demande de patienter et se met en place, prête à montrer l’exemple. Une dernière fois, elle ferme les yeux, pense à ses regrets, l’émotion la plus forte qui règne en elle à cet instant précis. C’est un fil orange, long et épais. Elle image sa magie comme une boule plus forte, désormais mêlée à ses émotions et quand elle rouvre les yeux, elle sent ses doigts crépiter sous le poids de sa magie. Sans plus attendre, elle donne un premier coup de poing, sans que rien ne se passe, puis un second qui déverse une première salve d’énergie magique et un troisième, plus fort et violent qui fait trembler les murs. Elle frappe le punchingball une quatrième fois et cette fois, la vague de magie qui se déverse forme des ondulations dans l’air, visibles à l’œil nul pour quiconque regarderait bien et qui vient repousser le punchingball à quelques mètres de là, s’échouer contre la barrière érigée plus tôt par Rachael pour les protéger et retomber par terre, plus inanimée que jamais. Elle sent que sa magie en demande plus, elle ne demande qu’à se déverser encore, mais elle s’arrête là, déjà un peu essoufflée par l’effort fourni dans cette aptitude dont eux, anglais, ont si peu l’habitude. une perle de sueur glisse le long de son front alors qu’elle se tourne vers Ophelia « C’est très énergivore comme nous n’en avons pas l’habitude, mais je pense que ça pourrait vous faire du bien. A vous maintenant » elle serre le poing pour continuer de ressentir sa propre magie et croise les bras sur sa poitrine, le regard rivé sur son élève tout en espérant que cette méthode pour le moins particulière pourra lui faire du bien et lui permettre de se défouler de la manière dont elle a tant besoin. « Quand vous êtes prête Ophelia, prenez votre temps »

C’est un exercice particulier dans lequel elle se lance et elle en a bien conscience, elle qui, comme l’ensemble de la communauté magique, comptait beaucoup sur sa baguette pour canaliser sa magie. Seulement expérimenter celle-ci sans avoir recours à la baguette allait peut-être être le moyen de l’aider à extérioriser ce qu’elle éprouve ces derniers jours sans réussir à s’en débarrasser. Ophelia est attentive car elle sait que Rachael l’aide sur son temps libre et que rien ne l’obligeait à lui offrir un tel moment et pourtant, elle le faisait sans hésiter ou protester. Elle garde les yeux fermés, s’imaginant sa magie et surtout ses sentiments comme elle venait de les décrire. Elle a l’impression de sentir sa magie parcourir chaque membre de son corps, traversant ceux-ci et vibrant avec une impatience particulière. C’est presque étrange de la ressentir aussi intensément alors qu’habituellement, il s’agissait plutôt d’une sensation éprouvée quand elle perdait tout contrôle. Cette fois, pourtant, c’est bien elle qui en est à l’origine, elle qui choisit et ça rend l’instant plus intéressant encore. « Je me sens forte. » Réponse qui quitte ses lippes sans hésiter alors qu’être si proche de sa magie et si consciente de celle-ci lui donnait l’impression d’être plus puissante qu’elle ne l’était habituellement. Ophelia hésite encore quelques secondes avant d’enfin ouvrir les yeux sans jamais lâcher cette vision forgée grâce à l’enseignante. Elle acquiesce avant d’offrir un léger sourire à Rachael, rassurée par ce qu’elle venait de dire. La vipère se tourne un peu pour pouvoir mieux observer la sorcière alors que celle-ci se met en position face à un punching-ball similaire au sien. Si rien ne se passe au premier coup, tout change quand Rachael frappe à nouveau. L’américaine ne peut louper la vague d’énergie qui s’échappe des coups qui suivent. Son regard est irrémédiablement attiré par les ondulations qui entourent l’enseignante et qui symbolise cette magie relâchée à son état le plus pur. Un sourire orne ses lippes face au spectacle se déroulant sous ses yeux alors qu’elle ne peut s’empêcher de se dire qu’elle trouvait la sorcière se défoulant devant elle incroyable, par cette force et ce pouvoir qu’elle dégage mais aussi par l’indépendance certaine qui émane d’elle. Elle est tout ce qu’elle voudrait être, une sorcière puissante, libre d’agir comme elle l’entend. Et si elle se doute que rien n’est aussi facile qu’il n’y paraît et que la sorcière face à elle a du lutter pour être où elle en est aujourd’hui, elle ne peut qu’aspirer à lui ressembler dans quelques années. La Burgess hoche la tête et se redresse quand Rachael termine et reporte son attention sur elle. « C’était incroyable ! » ne peut-elle s’empêcher de dire alors qu’elle prend place face au punching-ball. Elle ferme les yeux quelques secondes pour visualiser à nouveau cette pelote dont elles venaient de discuter et prend une nouvelle inspiration. Positionnant ses mains correctement, elle tente un premier coup sans que rien ne se passe. Le deuxième n’apportera rien non plus alors elle marque une courte pause et tente de visualiser sa magie, cette fois, et de la pousser vers ses émotions pour qu’ils se mêlent. Elle tente de choisir une émotion, se concentre sur la frustration et frappe une nouvelle fois. Cette fois, une vague de magie la quitte et s’échoue contre le punching-ball, ce qui pousse la sorcière à sourire et tourner la tête vers Rachael, fière. Ne voulant pas perdre ce qu’elle venait de faire, elle réitère l’expérience. Peu à peu, elle sent cette tornade qui l’envahit constamment ces derniers temps s’apaiser. Quand elle en vient à la colère, Ophelia ferme à nouveau les yeux car elle sait que ce sera sans doute ce qui sera le plus compliqué à quitter, émotion si familière qu’elle est devenue une seconde peau. Quand elle frappe, il ne se passe pas grand-chose et elle sait que c’est parce qu’elle s’y accroche, parce qu’elle ne lâche pas tout à fait prise sur cette émotion si dévastatrice. Elle repense alors à tout ce qui a pu l’énerver, aux remarques machistes qu’elle essuie, au destin qui est sien et qu’elle exècre pourtant tellement, à Leo et à ses mots, à leurs parents et à leur égoïsme et ça suffit à pousser la colère vers l’extérieur, assez pour que cette fois le coup apporté couplé à la magie ne déplace le punching-ball deux mètres plus loin. Un large sourire étire ses lèvres alors qu’elle se tourne vers Rachael, essoufflée. « J’ai réussi ! » C’est une fierté évidente qui vibre en elle et qui remplace le reste. Elle est épuisée, Ophelia, mais elle se sent véritablement bien. Si elle a conscience que ses problèmes ne sont pas réglés, l’exercice aura eu le mérite de la soulager au moins temporairement, en partie parce qu’elle se sent tellement vidée et fatiguée qu’elle n’aurait pas la force de s’énerver. « Je me sens.. Fatiguée, mais aussi calme, en quelque sorte. » tente-t-elle d’expliquer alors qu’elle reprend son souffle, frottant son front d’un revers de la manche. « Merci. » commence-t-elle alors. Elle se rapproche de l’enseignante en tentant un petit sourire. « Je sais que vous faites ça sur votre temps libre et vous n’étiez pas obligée mais.. Mais je crois que ça m’a vraiment aidé, alors merci. » Et si elle savait que ce n’était pas un exercice qu’elle pourrait reproduire tous les jours à cause de l’énergie qu’il demandait, Ophelia savait également désormais que lorsque tout semblait trop lourd pour elle, elle avait une béquille sur laquelle s’appuyer, un exercice qui pouvait l’aider à se défouler. « Où avez-vous appris un tel exercice ? » demande-t-elle alors qu’elle enlève ses gants un à un. Elle sent pourtant encore la magie crépiter dans ses extrémités, sensation agréable et presque apaisante maintenant qu’elle venait de se libérer d’un poids certain. « Enfin vous n’êtes pas obligée de répondre, ça ne me regarde sans doute pas. » ajoute-t-elle, consciente qu’elle s’adressait à une enseignante et qu’une certaine limite ne devait pas être dépassée.

Quelle sensation étrange et indescriptible que de sentir sa magie parcourir ses veines et se faufiler dans chaque particule de son être. Comme un ruisseau qui coulerait dans son sang, elle la sent, sa magie dans son état le plus pur, vibre avec puissance à l’intérieur d’elle. Elle est la magie, et la magie est elle - elles ne font plus qu’un et forment un tout qui donne à Rachael l’impression qu’elle pourrait soulever des montagnes et réduire le monde en cendres si elle le voulait. Si elle n’était pas aussi fatigante, cette expérience ôterait à quiconque l’envie d’utiliser sa baguette magique tant celle-ci semble refouler la magie à son état naturel. Rachael aime se sentir puissante, elle aime sentir ces vagues de chaleur se répandre dans tout son corps et aime encore plus sentir la magie crépiter au bout de ses doigts. Mais elle n’est pas là pour elle et reporte rapidement son attention sur son élève qui affirme se sentir forte, arrachant un sourire en coin à la métamorphomage, aussi fière qu’impressionnée par la spontanéité de la réponse de son élève qui était entrée dans sa classe avec un taux d’instabilité et d’insécurité déstabilisant. Alors qu’elle fait sa démonstration et se laisse envahir davantage par ce sentiment de puissance à l’idée de contrôler son noyau magique, la réflexion de son élève à la fin ce celle-ci lui arrache un nouveau sourire. « Merci, Ophelia. » Elle l’invite à son tour à prendre place et à se lancer et se met en retrait pour l’observer, juste derrière la barrière érigée pour les protéger. Les bras croisés sur sa poitrine, Rachael reste silencieuse et garde les yeux rivés sur son élève qui administre un premier, puis un second coup au punchingball sans que rien ne se passe. Elle pourrait intervenir et la guider, mais elle décide de ne pas le faire et de lui faire confiance pour trouver le déclencheur elle-même, à raison puisqu’au troisième coup, une première vague d’énergie vient s’échouer contre l’objet malmené. Du bleu vient teindre ses cheveux alors qu’Ophelia tourne le regard vers elle dans un sourire, Rachael en profitant pour lui faire un petit signe de tête entendu. Elle n’intervient pas et n’échange pas non plus le moindre mot, consciente que ce n’est pas fini et que la jeune Burgess a besoin de plus que ça. Elle reste en retrait, attentive à chaque mouvement et chaque grimace sur le visage de son élève. Elle l’observe se battre avec elle-même, puiser dans sa force et sa détermination, accepter ses émotions et les épouser jusqu’au coup final apporté contre le punching-ball qui vient le repousser à quelques mètres de là. Les cheveux remplis de mèches bleu-vert, signe d’une fierté évidente à l’égard de son élève, Rachael frappe lentement dans ses mains en se rapprochant d’Ophelia. « Vous avez réussi Ophelia » confirme-t-elle en lui offrant une bouteille d’eau. « Cet exercice ne réglera pas la source du problème, mais s’il a le mérite de vous apporter un peu de légèreté, j’en suis ravie. » D’un coup de baguette magique, elle ôte les protections autour d’elles. « J’ai eu l’occasion de voyager au cours de mes missions et de mes entraînements quand je travaillais au ministère » explique-t-elle à Ophelia en commençant à ranger les affaires. « Au cours de l’un de mes voyages en Afrique, je suis tombée dans une petite tribu africaine et j’y ai passé quelques semaines. Je leur ai offert quelques enseignements occidentaux et en échange, ils m’ont appris à me connecter à mon noyau magique et à me servir de cette magie de l’énergie. C’est bien plus facile pour eux, ils apprennent très jeunes à ne compter que sur leurs mains et non pas sur une baguette. » Au fil de ses explications, Rachael remet la pièce en état et se dirige vers la sortie, jusqu’à son bureau. Là-bas, elle invite Ophelia à entrer un instant et alors qu’elle range ses affaires dans un placard, elle en ressort une feuille de papier bleu clair sur laquelle elle pointe sa baguette magique. Sous leurs yeux, un lapin inanimé fait de papier semble les regarder. « Saviez-vous qu’ils symbolisent la peur, la renaissance et l’équilibre ? » Ce n’est rien de plus qu’un origami, à la différence près qu’il a une petite particularité. Elle le tend à Ophelia, et poursuit. « Vous avez été extraordinaire aujourd’hui Ophelia. Et vous êtes bien plus forte que vous ne le pensez. La prochaine fois que vous vous sentirez sur le point d’exploser ou de perdre le contrôle, je veux que vous repensiez à cet instant face à votre punching-ball, à combien vous vous sentiez forte, ce n’était que le reflet de ce que vous êtes vraiment. » Elle pointe du doigt le cœur de son élève, puis son visage pour accentuer ses mots et lui démontrer sa force. « Vous pouvez venir me trouver n’importe quand si vous ressentez encore le besoin de vous défouler, nuit et jour. Si vous tapez trois fois sur son museau avec le bout de votre baguette, il retournera ici, sur mon bureau, et je comprendrais immédiatement. Ensuite, nous essaierons de vous aider. » Elle pointe le lapin de papier du menton et offre un sourire à son élève ainsi qu’un regard entendu pour être sûre qu’elle ait compris. « Maintenant, allez vous reposer et prendre une douche, vous allez en avoir besoin. Et évitez de lancer un sort pour les deux prochaines heures, pour laisser à votre corps le temps de se réhabituer à ce que vous connaissez. » Elle se relève, ouvre la porte de son bureau pour laisser Ophelia sortir et l’observe s’éloigner alors que fierté et inquiétude se mêlent en elle. Dans un dernier soupir, elle retourne à son travail, non sans avoir pris le temps de réfléchir avant à d’autres idées d’exercices, juste au cas où, dans un futur plus ou moins proche, quelqu’un en ait besoin.