Ethel a la tête dans les nuages quand elle croise sa sœur dans les couloirs et que celle-ci l’invite à la rejoindre après les cours. Bouche entrouverte prête à riposter, elle n’en trouve pas le temps qu’elle voit Abigael s’éloigner et la laisser là, penaude, sans autre choix que d’accepter de la rejoindre à la fin de la journée. Un soupir au bord des lèvres, elle rejoint son cours de SACM et trouve un certain réconfort dans le fait de caresser quelques créatures, de les nourrir et les brosser, des gestes répétitifs qui l’empêchent de penser à la lettre qu’elle a reçue de Warren. Il veut la voir, dans deux semaines, à pré-au-lard. Et elle, l’âme saignant encore de leur rupture, n’a pas pu s’empêcher d’accepter, son cœur se remplissant malgré d’espoir et de tendresse pour l’ex-lion dont l’image restait nette dans son esprit et qu’elle était incapable d’oublier. Elle se languit de revoir son sourire, d’entendre à nouveau son rire et sa voix chaude l’appeler par les plus doux des surnoms, elle rêve qu’il entoure son corps de ses bras pour lui offrir une longue étreinte et effacer par la même occasion toutes ses blessures encore ouvertes et que son souvenir ne peut effacer. Elle a hâte de le revoir, Ethel, mais elle le craint aussi, parce qu’elle sait que si elle a fait de minces progrès depuis leur rupture – surtout aidée d’Eris et de son soutien indéfectible – elle n’est pas encore guérie de la maladie de l’amour, il lui faudra encore longtemps et elle n’est pas sûre que son rendez-vous avec son lion l’aide à avancer et tourner la page. C’est plus fort qu’elle pourtant, son nom et ses baisers sont encore gravés sur sa peau et sur son cœur et elle n’a d’autre choix que céder à ses désirs et répondre à son appel, avec l’espoir brûlant de pouvoir le retrouver et faire en sortent qu’ils se retrouvent, quand bien même donne-t-elle l’impression d’être pathétique et désespérée à cette seule pensée. Ces pensées tournoient dans son esprit tout au long de la journée et continuent de la torturer quand elle se rappelle l’invitation de sa sœur. Une pointe de culpabilité vient serrer son cœur quand elle songe à faire l’impasse et se réfugier dans sa chambre mais elle n’est pas capable de faire ça à Abi et c’est pourquoi, après être passée récupérer son écharpe et avoir récupéré quelques bonbons, elle prend la direction du lac noir en se demandant ce que lui réserve sa sœur. Plus elle approche, plus les formes se distinguent et elle reconnaît la silhouette de sa cadette assise par terre sur une couverture près du feu. Un sourire tendre éclaire le visage de l’aiglonne qui s’approche à pas feutrés de la benjamine et une fois près d’elle, elle entoure son cou de ses bras pour lui offrir une étreinte surprise. « Hey » elle penche la tête pour embrasser sa joue et se laisse ensuite tomber à ses côtés non sans ramener un plaid sur ses genoux pour se protéger du froid. « Tu as bien choisi l’endroit et le moment, c’est magnifique » Ethel montre du menton le soleil couchant se reflétant sur le lac encore gelé tandis que son regard dérive sur le bonhomme de neige entamé par sa sœur. « Tu tentes de recréer monsieur nuage ? » demande-t-elle, une pointe de taquinerie dans la voix. Souvenir d’une année très froide où tous les enfants Ponds, bien plus jeunes qu’aujourd’hui, s’étaient amusés à confectionner le plus gros bonhomme de neige du monde après quoi leur magie enfantine leur avait échappé et avait donné au bonhomme de neige un aspect guimauve, comme un nuage, ce qui lui avait valu son surnom plus qu’approprié. Il y a un sourire tendre qui fleurit sur les lèvres de l’aînée au souvenir de cette après-midi, c’était il y a si longtemps qu’elle a parfois l’impression que c’était une autre vie. « Qu’est-ce que tu as amené ? » demande finalement l’aiglonne pour éloigner ses pensées parasites et se concentrer sur l’instant présent : elle et abi, unies et ensemble.

Ethel, elle a toujours apprécié la réserve naturelle de sa sœur, sa capacité à être là tout en restant en retrait, sa façon de ne pas la brusquer et de lui laisser le temps de guérir de ses maux, au contraire de leur mère, beaucoup plus brutale dans sa manière de soutenir ses enfants. Elle l'aime, Abi, d'un amour indéfectible et invincible, et c'est guidée par cet amour et cette reconnaissance qui brûle en elle qu'elle se rend à leur point de rendez-vous, déterminée à passer du temps avec sa sœur pour oublier ses peines le temps d'un instant. Brève étreinte accordée à sa sœur une fois retrouvée, Ethel ne tarde pas à s'échouer sur la couverture posée au sol, rapprochant ses mains du feu pour les réchauffer tout en observant le paysage idyllique et en se faisant la triste réflexion qu'elle aurait bien aimé reproduire cette vision sur une toile. Attention détournée par Abi, l'aiglonne lui adresse une esquisse de sourire. « Tu devrais t'inscrire, ça te ferais du bien. Et si finalement ça ne te convient, tu auras au moins essayé. » petit coup d'épaule offert à sa sœur, elle se fait la réflexion interne de lui acheter un appareil photo à sa prochaine sortie à pré-au-lard – son premier, celui avec lequel elle pourrait commencer sa propre forme d'art. Le cœur serré par la nostalgie en souvenir de la première fois qu'elle a acheté ses propres pinceaux sur le chemin de traverse, sa mélancolie change de cible à l'évocation de souvenirs d'enfances, pensées détournées à l'évocation de monsieur nuage, symbole d'une enfance qui est désormais derrière elles et qui semble si lointaine à Ethel qu'elle a l'impression que c'était une toute autre vie. Ezra était encore là, les relations avec leurs parents étaient au beau fixe et tous les quatre, ils étaient soudés, si soudés que même le plus vaillant des hommes n'aurait pas su briser leurs liens. Mais c'était avant que tout s'écroule et qu'ils grandissent, avant que la réalité de la vie les rattrape et qu'ils se rendent compte que tout n'est pas aussi doux et pur qu'un bonhomme de neige. Les yeux dans le vague et les pensées volages, Ethel secoue la tête pour repousser ses idées parasites et boit une gorgée de chocolat chaud elle aussi, avant d'esquisser un sourire à la vue des patins. Elle n'a pas le temps d'accepter ou de s'extasier qu'elle se laisse entraîner par Abi vers la glace. Patins enfilés, la sorcière pose un pied maladroit sur le lac gelé et attrape la main de sa sœur dans la sienne. Une bouffée d'affection et de reconnaissance monte en elle et elle se surprend à respirer l'air à plein poumons, se laissant gagner par un sentiment de détente et de plénitude peu à peu. Elle ferme brièvement les yeux, se laisse imprégner des bruits de la nature, de la vision du soleil couchant derrière ses paupières, des bruits de la nature, de la présence de sa sœur. Elle entrouvre un œil amusé à la proposition de sa sœur et lâche sa main. « Tu oses poser la question ? » elle pointe sa baguette devant, et lance une gerbe d'étincelle pour placer une ligne d'arrivée factice quelques mètres plus loin, puis se met en position et au top départ, elle s'élance sur la glace, glisse avec autant de grâce que possible, et laisse sa sœur prendre la devancer après quelques secondes. Elle a envie de la laisser gagner, Ethel, et c'est ce qu'elle fait, dépasse la ligne d'arrivée seulement une seconde après Abigael, se laissant tomber sur la glace une fois leur course effrénée terminée. Sa poitrine se soulève rapidement, essoufflée par l'effort, mais elle apprécie la sensation de la glace sur sa peau, c'est aussi revigorant que galvanisant. « On dirait bien que t'as gagné, on aurait dû parier quelque chose ! Comme... Un paquet de bonbons de chez Honeydukes. » connaissant l'amour de sa sœur pour le chocolat, elle sourit avec espièglerie et hausse les épaules. « Mais bon, comme on a rien parié... » elle laisse sa phrase en suspens et se redresse en position assise avant de lever les bras vers sa sœur. « Tu m'aides à me relever ? » mais alors qu'elle s'exécute, Ethel a une autre idée en tête et s'amuse plutôt à entraîner sa sœur avec elle en la faisant tomber sur la glace, le tout en évitant de se blesser avec leurs patins. Elles auront sûrement du mal à se relever et repartir vers la terre ferme, mais tant que l'insouciance est là, c'est tout ce qui compte.

Elle est reconnaissante, Ethel, de pouvoir passer un moment privilégié avec sa sœur. Si elle a tendance à s'oublier au profit de ses frères et sœurs dont les besoins passent avant les siens, elle chérit pourtant chacun de leurs moments ensemble et n'échangerait sa fratrie pour rien au monde. Ils sont une partie d'elle, et leur affection est aussi ce qui l'aide à rester debout. Conseils offerts à Abi pour la guider jusqu'au club de photo dans lequel elle pourrait sans aucun doute s'épanouir, la discussion ne traîne pas plus longtemps autour de celui-ci, sujet avorté au profit d'une activité appréciée des deux sorcières. Ni une, ni deux, elles s'élancent sur la glace au top départ et glissent sur leurs patins avec plus ou moins d'aisance, quelques dérapages accompagnés de pertes d'équilibres, mais toujours dans la bonne humeur et la douceur, un moment saupoudré de quelques éclats de rire, tandis qu'Ethel laisse sa sœur gagner la course, pour mieux s'effondrer sur la glace. « Je ne t'ai pas laissé gagner. » proteste-t-elle en se redressant légèrement. Elle ne l'avouerait jamais, bien trop fière de voir le sourire sur les lèvres d'Abi. « Mais bon, va pour les bonbons » ajoute-t-elle dans un soupir faussement las, juste avant de la faire tomber par terre avec elle. Incapable de contenir un éclat de rire, elle lâche un petit « Oups » innocent devant le geste de sa sœur, haussant les épaules avec indifférence en la voyant se relever et tourner autour d'elle. « Encore heureux, je suis la jeunesse incarnée » s'offusque-t-elle faussement en tentant de se relever une première fois, tentative se solvant en un premier échec tandis qu'Abigael semble avoir pitié d'elle et lui tend les mains pour l'aider, et si dans un premier temps Ethel lui offre un sourire reconnaissant, celui-ci se dissipe quand elle comprend l'idée de sa sœur et qu'elle se voit entraînée dans des glissades, dérapages et jeux qu'elle n'a jamais instauré. Elle pousse des cris, rigole aussi un peu et hurle le prénom de sa sœur à deux reprises quand enfin, elles arrêtent de tourner. De retour près de la terre ferme, Ethel retire ses patins et se laisse tomber dans la neige. « Flynn sera super jaloux » confirme-t-elle avec un sourire amusé à la mention de leur frère aîné. « Dommage que tu n'aies pas encore d'appareil, on aurait pu le prendre en photo et lui montrer. » clin d’œil envoyé à sa sœur, elle reporte son regard sur le ciel, parsemé de mille couleurs si belles, un spectacle qu'elle apprécie particulièrement et qui fait rater à son cœur quelques battements. « Le monde tourne un peu » lâche-t-elle à sa sœur en rigolant. « Viens t'allonger à côté de moi ! Et après on ira recréer monsieur nuage » elle a le souffle un peu court et elle reprend doucement le contrôle sur sa respiration quand elle sent Abi s'allonger à ses côtés. À traîner ainsi dans la neige, elles risquent de tomber malade, mais à cet instant précis, Ethel s'en fiche. Elle étend ses bras et ses jambes, et commence à les bouger de haut en bas, pour créer un ange de neige, comme elle le faisait avec ses frères et sœurs quand elle était enfant. C'est la première fois depuis des semaines, si ce n'est mois qu'elle se sent si jeune, Ethel, si insouciante, si bien qu'elle avait presque oublié ce que ça faisait de ne pas être une adulte. Esquisse de soupir aux lèvres, elle dessine son ange dans la neige et, frigorifiée, se relève pour aller se faufiler sous un plaid et récupérer une tâche de chocolat chaud encore brûlante pour la réchauffer. Un sourire aux lèvres en voyant son œuvre – plus ou moins réussie – elle tourne son regard océan vers sa sœur. « On devrait envoyer un hibou à Flynn quand on aura fini, pour qu'il voie tout ce qu'il a manqué » pointe de nostalgie serrant son cœur en pensant soudain à Ezra, elle la refoule, pour se concentrer sur l'important, ceux qui sont là et qui l'ont toujours été, comme Abi.