La vie à Poudlard avait pris un sens différent depuis cette huitième année. Le cadre autour de l’école était plus souple, ne serait-ce que par les horaires différents sur le couvre-feu, mais aussi sur les sorties autorisées, notamment pour les stages. Aussi, doucement mais sûrement, les élèves, du moins Natalia, amorçaient tranquillement une transition vers la suite. La suite, pour elle, continuerait à Oxford, où elle allait poursuivre le développement de son éducation, de sa culture, et peut-être, de son futur métier. Si elle se mariait à un sorcier qui accepterait qu’elle travaille. Mais ça, c’était une autre histoire, une histoire que son père était chargée d’écrire pour elle puisqu’il semblait être la seule autorité à décider de qui serait son époux. Même son cœur n’avait pas voix au chapitre. Pourtant, elle était certaine que si elle l’écoutait, son battant, si elle se rendait un peu plus accessible avec les garçons, les hommes qui l’entourent, elle trouverait quelqu’un à aimer. Mais à quoi bon souffrir si l’avenir sur ce plan-là était décidé ailleurs ?
Ces réflexions soignaient son humeur morose de ce jour. Ça et son week-end chez elle, exceptionnellement demandé par sa famille, et dont elle se serait bien passée. Natalia en avait encore bavé, entre rodomontades et brimades, privations et sur stimulation pleine d’animosité. Comme à son habitude, elle avait feint l’indifférence la plus totale, elle avait encaissé, mais ça ne l’empêchait pas de ruminer.
«
Madame Wheeler, est-ce que je peux vous parler un instant ? » demanda-t-elle à la fin du cours, alors qu’elle avait rangé ses affaires après tout le monde exprès et que le dernier élève venait de franchir la porte.
Elle tenait son sac contre sa poitrine, avant d’ajouter :
«
La fin d’année approche maintenant, les examens sont pour bientôt, je ne sais pas si j’aurai encore l’occasion d’étudier la légilimencie à Oxford, et j’ai… J’ai besoin… » Elle hésita. Ce n’était pas le genre de Natalia, mais alors pas du tout, de demander de l’aide. C’était plutôt le genre d’élève à s’installer dans le milieu de la salle, histoire d’être fondue dans la masse et de ne participer que sur sollicitation du professeur, même si ça ne l’empêchait pas d’avoir d’excellents résultats globalement. «
J’ai besoin d’aide, pour en parfaire ma maitrise. J’ai… »
Elle détestait demander de l’aide. Elle se sentait subitement nulle, pas à sa place, la confortant dans ce qu’elle avait pu entendre ce weekend de la bouche de son père et de sa mère. Une boule de stress gonfla dans sa poitrine et sa gorge. Ça ne l’enchantait pas d’aborder Wheeler, qui ne semblait pas être la prof la plus accessible du panel. D’un côté, elle aimait son côté froid de femme forte, sans doute que ça lui parlait. Elle prit une inspiration en concluant rapidement, ses yeux quelque peu fuyants alors qu’habituellement, ils avaient une nette tendance à se fixer à ceux de son interlocuteur, quitte à ce que ça passe pour de la provocation :
«
J’ai vraiment besoin d’aide. Il faut que ça cesse. »
Il faut que ça cesse oui, il faut qu’elle montre à son père qu’elle aussi, elle peut lui infliger ça. Mais sa maitrise était trop fragile, et elle avait peur de se ridiculiser, de provoquer la colère d’Otto Levetzow, et pire encore, qu’il se moque d’elle à la moindre occasion, aimant à rappeler ô combien les femmes n’ont rien à faire avec ce don !
Elle allait entrer à l’université. Elle le savait, ses résultats seraient bons, elle n’en doutait pas. Elle allait devenir une étudiante, une adulte, son père allait devoir la considérer comme tel. Et surtout, elle devait le surpasser. Il
devait avoir peur d’elle !