Pour Caleb qui appréhendait les premières fêtes passées loin de sa famille, le voyage scolaire représente une opportunité extraordinaire. Il n’en a pas cru ses oreilles, lors de l’annonce, en dépit de ses beaux souvenirs de Grèce. Et sur place, c’est quasiment un rêve éveillé. Tout lui semble magnifique et intéressant, des superbes paysages enneigés, aux activités passionnantes proposées, en passant par les cours très intéressants. Le jeune homme aime apprendre, découvrir une nouvelle culture et d’autres traditions, s’intéresser à un autre pays et à d’autres peuples. En plus, il est avec ses meilleurs amis et son frère, ce qui rend forcément le voyage plus beau encore. Depuis son arrivée, Caleb a le sentiment de n’être que joie, redoutant déjà le moment où il faudra à la fois rentrer et revenir à la réalité. Car le mois de novembre et la première partie du mois de décembre n’ont pas été tendres avec lui. Pourtant, au milieu des tempêtes de la vie, il a toujours ses rocs. Et une nouvelle lueur d’espoir lui a même été insufflée, lui procurant presque autant d’étonnement que de joie. « Je te promets qu’elle est bonne ! » Le sourire aux lèvres, le cadet des Rowle découvre pour la toute première fois des sources chaudes. Au beau milieu de l’hiver, il est presque étrange de se retrouver à se baigner, pourtant c’est très agréable. Et évidemment, il ne voulait pas passer à côté de ça. Car si le but de ce voyage scolaire est bien sûr éducatif, il y a également bien d’autres choses à découvrir. Caleb ne sait plus où donner de la tête tellement il y en a à voir. Entre les plages de sable noir, les glaciers, les aurores boréales, les baleines, les chiens de traîneaux, les forêts, la patinoire, les grottes et les cascades, tout le monde y trouve forcément son compte et c’est peut-être la meilleure partie du voyage… Ou du moins, ce serait peut-être le cas si ce n’était pas aussi plaisant de partager tout ça avec des personnes aimées. « Je vous attends, miss Selwyn. » Regard complice, Caleb remonte un peu de l’eau pour tendre une main à Keira. Elle fait assurément partie des personnes qu’il est le plus heureux de côtoyer pendant ce voyage, comme une lointaine escapade à leurs soucis. Car s’évader ensemble, c’est un peu ce qu’ils ont l’habitude de faire depuis de nombreuses années. Main s’accrochant à la sienne, le brun aide la jeune femme à entrer à son tour dans la piscine naturelle. « Verdict ? » demande-t-il en souriant, relâchant finalement sa main. Chaleur qui se répand dans le corps, c’est une sensation très agréable - et au final, ils ont tous les deux ce qu’ils recherchaient, à savoir un peu de calme. « C’est sûr qu’on est plus tranquilles ici que dans le living-room du manoir. » Il est grand certes, mais ils sont aussi nombreux. Difficile d’échapper au bruit et, après un mois entier de cohabitation et seulement quelques jours de normalité retrouvée dans sa Salle Commune, Caleb comprend que ce soit ce que Keira recherche en ce moment. « Qu’est-ce que tu a le plus hâte de voir, ici ? » L’aiglon cherche sa propre réponse dans son esprit, car les possibilités sont infinies. Il souhaiterait surtout que le temps s’arrête, qu’une pause soit faite sur ces beaux moments en bonne compagnie. « Tu as prévu quelque chose, à notre retour au Royaume-Uni ? » Car s’il est agréable de se baigner dans les sources chaudes, Caleb compte aussi profiter en même temps de la compagnie de Keira : il l’a toujours appréciée, mais c’est de plus en plus le cas ces temps derniers.
« Viens, on va se cacher quelque part » elle avait murmuré ces mots et avait attrapé la main de Caleb en riant avant de s’enfuir un peu plus loin. Le manoir était très joli mais elle le trouvait beaucoup trop petit pour supporter cohabiter avec autant de personnes à la fois. Un mois entier à supporter aigles et lion au quotidien, quinze jours de tranquillité qui avaient été beaucoup trop courts avant qu’ils ne s’échappent pour l’Islande. A l’annonce du voyage, Keira n’y avait pas cru, elle avait hoché la tête, septique. Elle s’était amusée de l’endroit et avait rêvé découvrir une autre culture, jusqu’au moment où elle avait appris qu’à nouveau, ils devraient cohabiter, cette dernière année au château la sortait de sa zone de confort un peu trop souvent. Si les sources chaudes avaient été glissées à son oreille, c’est dubitative qu’elle s’était changée et qu’elle regardait à présent Caleb profiter de l’endroit. Les vapeurs qui s’échappaient de l’eau la rassuraient légèrement, le sourire de Caleb et sa phrase se voulant rassurante un peu plus. Et attrapant sa main, elle glissa ses pieds dans l’eau chaude. « Monsieur Rowle, votre galanterie ne cessera jamais de me surprendre » Elle tenta de faire une révérence et, perdant l’équilibre, se rattrapa à l’épaule de l’aiglon avant de s’installer à ses côtés « Je vais éviter de me rompre le cou, même si je rêverais de passer plus qu’une vie entière ici » Elle soupira de bonheur, tout était parfait. Ce voyage lui apportait une toute nouvelle connaissance, les paysages l’éloignaient de ses problèmes, sa brouille avec Damian n'était plus et elle profitait de ces doux moments avec des personnes avec lesquelles elle se sentait bien. Caleb et Keira, c’était une histoire d’enfants qui s’échappent de soirées mondaines, c’était désormais celle de deux jeunes adultes qui s’échappent d’une réalité qu’ils ne voulaient pas. Au cours de ces dernières semaines, le visage du jeune homme avait permis à Keira de trouver sa bulle d’air. Sa question la fit tourner le visage vers son ami « C’est très agréable » Le froid et le chaud qui se rencontraient sur sa peau était une sensation qu’elle ne connaissait pas et avec un regard malicieux, elle questionna « Tu as d’autres idées de cachettes, comme ça ? » Elle riait légèrement avant de s’éloigner de lui, jouant avec l’eau dans laquelle elle mit la tête avant de remonter. « Les aurores boréales je pense … et il parait qu’il y a une cascade à couper le souffle pas très loin, tu y as été ? » En vérité, elle n’aurait pas assez d’une semaine pour découvrir tous les recoins qui lui donnaient envie mais elle alors rêvait surtout de pouvoir arrêter le temps. A l’évocation du Royaume-Uni, elle grimaça avant de répondre « J’aimerais ne penser qu’à l’Islande pas toi ? » Elle allait surement retrouver sa famille et partager les fêtes avec Damian, le retour à un quotidien qui ne la faisait pas rêver, mondanités et courbettes. « J’ai envie de profiter, pas toi ? Ce qui se passe en Islande, restera en Islande ! » Et elle lui adressa un clin d’œil, c’était le bon moment pour oser être soi-même.
Les paroles douces de Keira font sourire Caleb, lequel la tient pour la rattraper au moment où elle manque de perdre l’équilibre. Si les contacts physiques n’ont jamais été véritablement rares entre eux, le jeune homme se surprend à se dire que ces dernières semaines, ils se sont peut-être multipliés. Et s’il essaye d’éviter d’y penser, Caleb se doute bien que ce n’est justement pas très bon signe. Mais il chasse ces pensées de son esprit, pour se concentrer sur la beauté de l’instant présent. « Oui, ce serait dommage. On a encore plein de belles choses à voir par ici ! Mais autant dire que si ton rêve se réalisait, alors Poudlard me paraîtrait bien vide sans toi. » Elle lui manquerait, tout simplement. Elle a toujours fait partie de sa vie, mais sa présence s’avère indispensable plus particulièrement depuis quelques temps, sans que le gallois sache vraiment pourquoi. Quoi qu’il en soit, c’est tout à fait naturel pour eux de se retrouver à nouveau ensemble pour s’échapper, rire ensemble loin des autres. C’est seulement un cadre différent, un paysage idyllique même. « Oui, c’est très agréable. Et c’est très beau aussi. » Les alentours évidemment, mais elle aussi est très jolie. Quand elle est loin de ses préoccupations habituelles, maintenant qu’elle semble libérée de sa cage dorée, Keira brille d’un éclat tout à fait différent. Elle est rayonnante et ça la rend radieuse, halo qui semble émaner d’elle pour éclairer les alentours. « Non, je ne suis pas encore allé à la cascade. Mais je suis allé plus près des glaciers et dans la fameuse grotte. » En dépit du froid polaire, Caleb veut saisir chaque occasion pour voir, découvrir, apprendre. Si en plus il est en excellente compagnie, c’est la cerise sur le gâteau. « On devrait aller voir les cascades, pour notre prochaine escapade. » Car il y en aura au moins une autre avant qu’ils rentrent en Écosse, le préfet-en-chef en est persuadé. « Et pour profiter des aurores boréales comme il se doit, j’aurais presque l’impression qu’il ne faut en manquer aucune tant qu’on est là. » Au final, Caleb sera peut-être plus fatigué en rentrant, mais peu importe : au moins, il en aura profité comme il se doit et il aura bien le temps de se reposer après. « Tu as raison. Mieux vaut ne penser qu’à l’Islande. » Il y aura bien assez de temps après aussi pour réfléchir, se poser des questions, se tracasser l’esprit. En attendant, ils sont là tous les deux, et la réplique de la jeune femme fait rire le brun. « Miss Selwyn prévoirait-elle des folies sur le sol islandais ? » Dans leur univers, tout est relatif. Mais effectivement, c’est peut-être l’occasion de lâcher prise et de s’amuser comme il se doit. Dans cette optique, Caleb commence à l’éclabousser, avant de s’éloigner aussi vite que possible pour tenter de lui échapper. La densité de l’eau rend difficile ses déplacements, mais il n’en essaye pas moins de courir, ce qui au final le fait encore plus rire. Le sang-pur se retourne pour l’éclabousser à nouveau mais cette fois, au lieu de vouloir s’enfuir, il s’élance vers la brune et glisse un bras autour de sa taille. Et il l’entraîne avec lui en s’enfonçant légèrement dans l’eau, dans une spirale de rires et de bonne humeur. Enfin, Caleb s’arrête de courir, le corps toujours à moitié immergé dans l’eau et le bras encore passé autour d’elle, avec la sensation qu’il ne pourrait jamais être aussi heureux que dans l’instant présent, qu’il ne pourrait jamais connaître de moment aussi doux que celui qu’il partage dans l’immédiat avec celle qu’il connaît depuis si longtemps.
Le contact de la peau de Caleb tout contre la sienne, glacée, la fait frémir. Une situation que ne relève pas Keira qui est d’ordinaire moins encline aux touchers. La situation semble naturelle et évidente. Rassurée par la présence de Caleb, elle rit légèrement à l’idée de tomber et soupire de soulagement alors qu’il la rattrape, lui avouant qu’elle lui manquerait, si elle venait à quitter le château. Une proximité qui s’installe entre les deux qui ne manque, cette fois-ci, pas de toucher Keira. Le souffle chaud de l’aiglon traverse la distance qui les sépare et un instant, elle le fixe sans parler avec l’envie de rester à son contact. Avant de le lâcher et de plaisanter « Je suis sûre qu’il y a tout un tas de prétendantes qui t’attendent tapies dans l’ombre d’un couloir » Elle le taquine en le poussant légèrement de l’épaule « Je suis presque jalouse ! » Elle rit et ne fait pas attention à ce nœud qui se forme dans son ventre à l’évocation de filles qui pourraient l’approcher et passer du temps avec le jeune homme, du temps qui ne lui serait plus dédié. Ces dernières semaines ont vu naitre une nouvelle proximité entre eux qui plait beaucoup à la verte et argent, des rendez-vous qui lui permettent de retrouver le sourire chaque fois qu’ils partagent un moment, dans les appartements, le parc ou jusqu’à la soirée du septième étage. Des moments ponctués par une correspondance qui rythme ses journées, attendant avec impatience un petit mot, une histoire à lire, un souvenir à partager avant de lier les mots à son tour. Elle admire les alentours et hoche la tête pour toute réponse, cet endroit était magnifique et hors du temps, heureuse, ses yeux brillants fixent souvent Caleb, les contours de son visage qu’elle pourrait définir les yeux fermés tellement elle passe du temps à le dessiner dans son esprit, ses yeux emplis de douceur qui la réconfortent et sa voix posée qui la rassure. « Je suis allée sur la patinoire avec Damian » elle rit au souvenir de cette aventure avec son frère et sourit à nouveau à l’évocation d’un nouveau rendez-vous près des cascades cette fois puis l’évocation d’une excursion pour admirer les aurores boréales. « Tu vas finir par te lasser de moi » Une brise légère la fait trembler, à moins que ce ne soit l’idée qu’il puisse se lasser et qu’ils finissent par se quitter comme ils s’étaient retrouvés alors, elle s’abaisse doucement dans l’eau jusqu’à la lèvre inférieure avant de raconter « Il parait qu’il y a un trésor caché derrière, tu en as entendu parler ? » Ses bras sont en mouvement pour ne pas rester figée, savourant cette sensation entre le froid extérieur et la chaleur de l’eau, elle tourne la tête avant de rire à nouveau. « Pas toi ? Aucun secret à laisser en Islande ? » Si elle tente de s’approcher de Caleb pour lui jouer un tour, elle n’est pas très douée, en témoigne son prénom encore gravé sur sa clavicule. Elle rit de bon cœur en tentant à son tour de l’éclabousser, courir dans l’eau et jouer comme l’enfant qu’elle se souvient avoir été. Naïve, elle ne se rend pas compte qu’il l’attrape et l’amène plus profondément sous l’eau et en une fraction de seconde, elle retient sa respiration et ferme les yeux très fort, son cœur battant à mille à l’heure. Elle sent la peau la gagner, celle du calmar du lac noir, de l’inconnu des profondeurs mais elle se contente de serrer les poings, appréciant davantage le contact de son bras autour de sa taille. Et si la surface finit par resurgir, c’est la proximité de leurs deux corps qui cette fois, fait battre le cœur de Keira.
Riant de bon coeur, Caleb esquisse une moue dubitative. « Je suis loin d’en être aussi certain que toi ! Et de toute façon, même si c’était le cas, ça ne m’intéresserait pas beaucoup. » Le jeune homme hausse vaguement les épaules. S’il réfléchissait au premier degré, il dirait que c’est parce que c’est encore trop tôt après sa rupture. Mais s’il devait être honnête avec lui-même, Caleb avouerait que c’est parce que ses pensées sont déjà bien orientées. « Aucune raison d’être jalouse, personne ne prendra jamais ta place dans mon coeur. » L’affirmation est claire et nette, appuyée par un clin d’oeil complice de la part du sang-pur. Mais au moment où il prononce ces mots, Caleb se demande s’ils ne donnent pas trop l’impression d’avoir un double sens. Cette pensée en elle-même est étrange, car avant il ne se posait jamais ce genre de questions à propos de Keira. Qu’est-ce qui a bien pu changer en aussi peu de temps ? Le gallois n’est certain de rien et pourtant, il ressent bel et bien ce changement dans l’atmosphère, ce changement dans sa manière de la voir, ce changement dans leur relation tout court. C’est comme s’il y avait quelque chose en plus désormais et, si l’être humain n’était pas capable d’être aussi aveugle quand il s’agit de lui-même, Caleb aurait assurément déjà tout compris. Leur proximité nouvelle, le fait qu’il ait compté de plus en plus sur elle ces dernières semaines, leurs échanges épistolaires en plus de leurs rendez-vous plus fréquents, le fait que ses pensées convergent vers elle avant de s’endormir et au réveil, et désormais le frisson lui parcourant la peau à son contact : tous ces éléments ne sont que des indices supplémentaires menant à une seule et même direction. L’aiglon n’en est pas à ce niveau d’honnêteté envers lui-même et pourtant, l’évidence crèverait probablement les yeux à quiconque les observait un minimum. « Je me suis jamais lassé de toi depuis qu’on est tout petits, alors permets-moi de douter que ça puisse arriver un jour ! » Nouveau clin d’oeil complice alors que ce qu’il voudrait dire en réalité, c’est qu’il aime trop sa compagnie pour se lasser d’elle. Caleb ne comprend d’ailleurs pas comment ça pourrait arriver auprès de qui que ce soit, même s’il ne le dit pas à haute voix. Au lieu de ça, il préfère continuer à faire des plans, éléments concrets qui lui mettent du baume au coeur. « Oui, j’ai entendu parler de cette légende. Ça me donne encore plus envie d’aller visiter les lieux ! » Des générations de locaux et de touristes ont dû chercher avant eux, mais ça lui est égal, l’essentiel étant la curiosité suscité par ces lieux et évidemment leur beauté. Car il en reste, des choses à découvrir dans les environs, en si peu de temps. « Aucun secret à laisser en Islande » affirme-t-il sans détours. Pourtant, le préfet-en-chef ne devrait peut-être pas en être si sûr. Car des sensations nouvelles semblent s’emparer de lui, au moment où leurs corps se frôlent, au moment où leur proximité le fait frissonner, à l’instant où il réalise que ce contact lui procure plus de chaleur qu’il ne l’aurait cru. Son coeur rate un battement, son souffle se fait plus court et il est obligé, à cet instant-là, d’admettre en son for intérieur le plus profond que c’est l’effet qu’a leur rapprochement sur lui - l’effet qu’elle a sur lui. « Ou alors… » Cette fois, Caleb n’a plus vraiment le choix de douter de la véracité de son affirmation précédente - et de bien d’autres, en réalité. Bras toujours autour de la taille de la jeune femme, il sent les battements de son coeur s’accélérer. Elle est si incroyablement belle, c’est presque irrésistiblement qu’il finit par réduire la distance encore entre eux, s’arrêtant à seulement quelques centimètres pour lui laisser l’occasion d’émettre une objection. Puis il finit par poser les lèvres sur les siennes - un geste qu’il n’aurait jamais envisagé auparavant et qui pourtant lui semble être la chose la plus naturelle au monde (et aussi la plus agréable) dans l’instant présent.
Elle n’y croit pas vraiment, au désintérêt de Caleb pour les filles et si elle le regarde en plissant des yeux, d’un air suspect, au fond, le nœud dans son estomac se desserre et elle sent l’air à nouveau emplir ses poumons. Une réaction qu’elle ne cherche pas à comprendre et qu’elle ne relève même pas. Ces dernières semaines aux côtés de l’aiglon lui ont fait un bien fou et si elle n’a jamais été aussi proche d’une autre personne, leur relation naissante semble naturelle. Aussi naturelle que la jalousie qui la tiraille alors qu’elle l’imagine aux côtés d’une autre fille, riant de bon cœur, la touchant du bout des doigts et s’il lui promet qu’elle a une place dans son cœur, Keira ne peut s’empêcher de rétorquer « Jusqu’à ce qu’une toute douce et gentille fille viennent attraper ton cœur » Elle se souvient l’avoir vu dans les couloirs aux côtés de la douce Eris, cette même fille qui lui a fait quitter sa famille et oser une rébellion qu’elle n’avait jamais pu réussir. Ce jour là pourtant, la complicité qui les unit parais plus fort que le regard charmeur d’une autre fille, contre le sourire enjôleur d’un autre Serpentard, ce jour-là, Keira semble différente et loin de ses peines de cœur. Une évidence que tout le monde pourrait apercevoir sauf eux. Des sentiments différents des blagues qu’ils avaient pu se faire jusque-là, des rires qu’ils avaient partagés et ce fourmillement qui la gagnait chaque fois qu’il portait le regard sur elle, le même qu’elle avait ressenti lorsque Bea lui avait tatoué les cinq lettres sur son omoplate, comme une évidence. Et s’il ne s’était jamais lassé d’elle, Keira trouva toutefois à redire « Je ne suis pas la même au quotidien qu’en soirée mondaine » Non, elle était différente et si on apprenait à la connaitre, si elle se sentait en confiance et si un vent de liberté la portait, alors elle riait telle une enfant, elle avait ce regard empli de surprises et elle vivait. « Je t’invite alors ! Allons à la recherche du trésor oublié ! On partage 50/50 » Elle riait à l’idée de trouver le trésor caché et de partager avec Caleb, un trésor dont ils n’avaient certainement pas besoin, à moins que ce soit pour acheter leur liberté. S’il ne semblait avoir aucun secret à laisser en Islande, Keira s’était promise de se détendre et de vivre, des secrets, elle en aurait, le premier était sans aucun doute ce moment hors du temps dans les sources chaudes, seule avec Caleb. Et si elle s’était retrouvée paniquée en sentant l’eau sur son visage, elle s’était rattrapée à la présence du jeune homme et à son corps qui semblait la protéger. Et leurs corps se frôlent, son ventre se noue d’une drôle de sensation et l’envie de le toucher, encore. Tout se passe vite et sans décrocher son regard de celui de Caleb, elle sait ce qui se passe, elle le désire et son cœur s’accélère. Si les bras de l’aiglon viennent embrasser sa taille, c’est la proximité qui la fait fondre totalement, le souffle chaud contre sa peau et son odeur qui empli ses narines avant de sentir le gout de ses lèvres tout contre les siennes. Un baiser qui répond à ses désirs et à cette attirance qu’il y a entre les deux, un baiser auquel elle répond, doucement puis plus ardemment avant de reprendre son souffle, elle murmure « quel secret ! » Elle fixe le bas de son visage, elle sourit avant de plonger son regard dans celui de Caleb, glissant une main dans ses cheveux humides, elle dépose un léger baiser sur ses lèvres, comme avide de recommencer et elle sait, qu’elle a sa place là, dans ses bras.
« Je ne pense pas que ça arrivera deux fois de suite. » Si Caleb ne veut pas faire d’affirmations sur lesquelles il pourrait n’avoir aucun contrôle au final, il y a en revanche dans son esprit un doute persistant qui lui permet d’avoir un minimum d’assurance - et qui est assurément lié à ces sensations nouvelles que lui-même ne perçoit pas encore très bien. Il s’en pose des questions et pourtant, comme tant d’autres grandes interrogations de la vie, le jeune homme n’a pas l’impression de trouver des réponses satisfaisantes. Mais ce qu’il sait, c’est qu’à l’instant précis, rien d’autre ne semble compter que cette complicité partagée, rien ne semble plus important que la beauté de ce moment à deux, rien ne semble lui réchauffer autant le coeur et lui apporter autant de réconfort que ces contacts précieux. Alors c’est tout naturellement qu’il répond à l’objection de Keira. « Je ne demande qu’à apprendre à mieux te connaître au quotidien. » Comprenant qu’il ne sert à rien de protester et d’affirmer combien il pense déjà pouvoir dessiner chaque contour de sa personnalité, Caleb va plus loin encore, avec une spontanéité qu’il ne reconnaît presque pas. Car en temps normal, le sang-pur a le désir de peser soigneusement chacun de ses mots, de réfléchir à l’avance à chacune de ses décisions. Mais auprès de la brune, c’est comme s’il n’en ressentait pas le besoin. C’est comme s’il pouvait simplement être lui-même, pouvoir s’exprimer librement - et au fond, c’est peut-être tout ce qu’il a recherché et désiré depuis sa plus tendre enfance, sa place auprès de quelqu’un, sans jugement. « Tu imagines ce qu’on pourrait faire, avec un tel butin ? » La vérité, c’est que les familles Selwyn et Rowle sont riches, très riches. La vérité, c’est qu’ils n’ont jamais eu à se soucier de ce qu’ils allaient manger, porter, acheter. Ou du moins, c’était vrai pour Caleb jusqu’au moment où il a décidé de quitter le manoir familial. Désormais, ce n’est pas tant l’aisance financière qui lui manque que la certitude d’appartenir à une famille, quelle qu’elle soit. « Ce serait un nouveau vent de liberté. » Concept tant recherché, idéal tant désiré par la majorité des enfants issus de leur univers, point commun qui continue à les unir envers et contre tous - en même temps que les secrets. Parce que c’est ce que la jeune femme évoque, et c’est précisément ce qui semble commencer à les rapprocher encore davantage, moment volé hors du temps, cap franchi avec le plus grand des naturels, pas supplémentaire dans une toute autre direction et pourtant effectué sans se poser de questions car plein de spontanéité. Sensation douce des lèvres de Keira contre les siennes, odeur fleurie qui vient chatouiller ses narines, chaleur qui se répand si agréablement dans son bas-ventre, le brun voudrait pouvoir stopper le temps, faire pause pour prolonger ce moment à l’infini. Le regard partagé est d’une incroyable intensité et, incapable de se détacher d’elle, Caleb est grisé par les sensations qui s’emparent de lui. Il sait déjà, même s’il refuse de penser à plus tard, qu’il aura du mal à oublier ce baiser d’abord doux, puis ardent, perfection incarnée d’un premier instant partagé. Alors au moment où elle dépose un autre baiser sur ses lèvres, l’aiglon le prolonge avec un bonheur incontesté. Il resserre son étreinte autour de la taille de la vipère, désireux de continuer rapprocher son corps du sien et pourtant appréhendant l’idée d’aller trop loin et de la faire fuir en même temps. Il finit par dégager une mèche brune se perdant sur son beau visage, son regard se perdant dans le sien. « Je voudrais être nulle part ailleurs, avec personne d’autre. »
« On pari ? » Caleb était doux et attentionné, il était certain qu’une multitude de filles viendraient encore briser son cœur avant qu’il ne tombe sur la bonne personne, c’était ainsi qu’elle voyait les choses pour lui, ainsi qu’elle était certaine qu’il vivrait encore quelques années avant de devenir un adulte responsable et posé. Ce dont elle était moins sûre, c’était qu’elle serait surement l’une d’elles. Si elle se sentait bien avec Caleb, si elle espérait qu’il la prenne dans ses bras et pose ses lèvres sur les siennes, elle ne s’en rendait pas vraiment compte et son esprit était loin d’imaginer qu’elle pourrait apprécier plus qu’une virée dans les sources chaudes à discuter de peines de cœurs. Et vint le moment où ils parlèrent des différences et de leur quotidien et à la remarque du jeune homme, Keira sourit. « Tu n’imagines pas comme je peux être odieuse ! Je ne suis pas une serpentard pour rien » Les clichés avaient la vie dure et Keira les perpétraient sans fondement. Elle était loin d’être odieuse, mais cette distance qui les séparait la rassurait un peu, elle aimait voir ce doux regard posé sur elle, elle aimait ce manque de jugement et ce sourire qui lui permettait de se sentir bien, humaine et entière. Loin des clichés de familles de sang-pur, loin des lois, des conditionnements et des mauvaises farces, les mots avaient un impact sur leur construction et elle savait qu’elle serait si différente si quelques années auparavant, elle avait rejoint la tour des aiglons et non le sous-sol froid qui avait vécu ses nombreux secrets et doutes. A l’évocation de butin, de magie et de secrets, les yeux de Keira s’illuminaient telle une enfant et elle haussait la voix légèrement, enchantée par la perspective d’être riche sans famille « On pourrait parcourir le monde ! » La vérité, c’est qu’elle savait qu’elle n’avait pas besoin d’oseille pour parcourir le monde, mais plus encore, le nom qu’elle portait, la réconfortait. Et elle hochait la tête à l’évocation de la liberté qu’il leur manquait à leur bonheur. Était-elle vraiment libre de parcourir le monde ? De vivre une passion dévorante ? De se sauver au clair de lune pour embrasser la personne qui faisait chavirer son cœur ? Le visage d’Arthur entra dans ses pensées, bien vite effacé par un tout autre visage, celui qui, à présent, était bien plus proche qu’il ne l’aurait dû. Le gout de ses lèvres tout contre les siennes avaient ce quelque chose de familier et d’inattendu, elle en redemandait et doucement, posa à nouveau ses lèvres sur celle de Caleb, l’emportant dans un baiser plus passionné encore, comme si sa vie en dépendait, comme si elle avait besoin de ce contact pour se raccrocher à sa vie et à nouveau, leurs regards s’accrochèrent à l’autre et les mots furent plus forts encore qu’elle ne l’aurait pensé. Dans un véritable sourire, de celui qui font briller les yeux et battre les cœurs, elle caressa la joue de l’aiglon avant d’avouer à son tour « Personne d’autre … » Et elle prit peur. De ce qu’ils venaient de vivre, de ce qu’ils éprouvaient certainement et de ce baiser qu’elle avait envie de vivre, encore. Et plus qu’un baiser, c’est le souffle de Caleb contre sa joue, sa voix au creux de son oreille ou ses mains contre sa peau chaude dont elle avait envie, c’était lui. Son rire, ses mots, son regard et ses pensées toutes entières. Doucement, elle rejoignait le rebord et se hissait, s’arrêtait et le regardait tendrement, avec l’envie de lui tendre la main, avec l’envie de poursuivre ailleurs, de ne pas le quitter, de se promettre bien plus qu’un secret en Islande alors, doucement, elle l’invita au retour « On va finir par manquer à quelqu’un » Le jeu du cache-cache était terminé et le retour à la réalité était obligatoire. La mort dans l’âme, Keira se glissa dans le salon plein à craquer, mais l’esprit encore dans les sources.
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