Les révisions étaient terminées, ou tout du moins Lyall en avait-il décidé ainsi pour la fin de sa journée. Même s’il savait que cela restait une part importante de son cursus, il ne pouvait tout simplement pas se résigner à passer tout son temps libre entouré par le silence bercé par les frottements des pages qui se tournaient à mesure que le temps passait. Un mal nécessaire mais qui se devait prendre fin tôt ou tard. Refermant son bouquin avant de lâcher un soupire, signe manifeste de la sensation du devoir accompli et que le repos se faisait grandement attendre, il jeta un dernier regard sur la couverture de ce dernier. Décidément, la botanique était un vaste sujet et s’il n’allait pas se rafraichir un petit peu la mémoire dès qu’il le pouvait, il avait peur de faire une erreur d’inattention et produire une catastrophe inattendue. Il en était de même pour les potions, mais de son propre aveu, il s’y sentait de toute façon plus à l’aise.

Longeant les couloirs et rangées de livres, manuels scolaires et autres contes emplissant les rayons de la bibliothèque, il finit enfin par revenir devant la place vacante du livre qui finirait de nouveau à sa place. Rentrant là comme une pièce de Puzzle ayant trouvé sa place, il pensa enfin à retourner dans sa salle commune ou peut-être voler un peu sur le terrain de quidditch en attendant le coucher de soleil. Une perspective qui le tentait particulièrement pour pouvoir faire le vide dans son esprit alors que son regard fut attiré par la tranche d’un livre qui semblait dénoter, et surtout… Bouger. Bien entendu, les choses étranges étaient pour ainsi dire la norme à Poudlard mais la curiosité de Lyall le poussa malgré tout à se rapprocher du livre et à le prendre en main. Les tremblements de ce dernier ne s’arrêtèrent pas tout de suite, laissant une sensation fourmillante dans les extrémités de ses doigts tandis qu’il regardait la couverture faite de cuir et sur laquelle aucun titre ne venait annoncer aux futurs lecteurs ce qu’ils avaient entre les mains. Sans doute ne l’aurait-il pas ouvert s’il avait lu quelque chose comme « Reflet de Serpentard » ou encore « Souriez, vous êtes fixé », mais comme rien n’indiquait le piège dans lequel il allait tomber, la tentation fut trop forte.

En ouvrant le livre, il se retrouva alors face à face avec le miroir ovale et scintillant, avant d’y voir une tête qu’il connaissait déjà. Se disant tout simplement que ce livre devait être un moyen pour deux personnes de communiquer à distance sans se faire attraper, il essaya de le refermer… Sans succès. Après tout, ses yeux semblaient rivés sur ce reflet et lorsqu’il bougeait le livre, ses yeux puis son cou ne faisaient que le suivre, comme attirés par ce miroir et la vision qu’il renvoyait. Cette situation plutôt problématique le laissa sous le coup d’un soupir amusé.

« Dis-moi Hestia, ce serait pas un point noir que je vois sur le bout de ton nez ? » Dit-il, légèrement moqueur et surtout amusé par la malédiction qui aurait pu être pire. Ce n’était pas comme si les deux élèves ne pouvaient pas se supporter, même s’il n’y avait aucun doute sur le fait qu’ils avaient probablement tous les deux espérés que leur soirée ne se résumeraient pas à se débarrasser d’une malédiction pour narcissiques.

« Je pense qu’on ferait mieux de déjà se retrouver dans la bibliothèque, t’es dans quel rayon ? » Demanda-t-il, prêt à faire le trajet à l’aveugle en espérant ne pas faire trop de bruit pour ne pas éveiller la colère de la bibliothécaire.

La bibliothèque était si calme, cet après-midi, qu'elle n'en ressentait même pas une once d'apaisement; c'était trop inhabituel pour être souligné, c'était comme si quelque chose se préparait. Ou peut-être n'était-ce que sous son crâne et elle restait là, à ne pas parvenir à se concentrer sur son travail à rendre en Botanique, figée devant son parchemin vierge. Elle devrait rapidement demander de l'aide à quelqu'un d'autre ou elle ne tarderait pas à se laisser déborder par la masse de choses qu'elle avait à rendre ces prochains jours. Il n'y avait même pas de chuchotements autour d'elle, tout le monde était affreusement silencieux, aussi, elle se leva et, rangeant rapidement ses affaires dans son sac, elle parcourut les quelques mètres la séparant de l'endroit où elle avait emprunté le lourd volume. Son esprit se mit à vagabonder alors qu'elle remontait l'allée pleine de livres, et il ne lui fallut pas longtemps pour s'abandonner une fois encore totalement à son imagination et tout ce qu'elle lui envoyait ces derniers temps. Parce que le mariage approchait et que déjà elle avait en tête de trop nombreuses choses pour sa préparation; sa robe qu'elle avait enfin trouvé, les fleurs qu'elle avait commencé à récolter dans le parc de l'école et à faire pousser dans le dortoir, dans quelques pots miniaturisés sous son lit, et parfois même, elle se prenait à tresser ses propres cheveux pour voir quelle coiffure lui irait le mieux. Elle était prête et elle n'attendait que cette occasion d'enfin pouvoir unir son nom à celui de Thomas, dès lors que Flora y sera prête également, dès lors qu'ils auraient tout préparé et pensé à la moindre chose: il ne serait pas temps alors de contrer une quelconque attaque de leurs parents, tout devait être millimétré. Alors que son esprit vagabondait jusqu'à la cérémonie approchant, elle sentit l'étagère sur laquelle elle venait de reposer le livre se mettre à vibrer. Posant sa main sur la tranche des ouvrages devant elle, elle remonta de quelques mètres l'allées jusqu'à un épais volume broché de sombre reliure et le tira de l'étagère. Elle ne mit pas longtemps à parvenir à l'ouvrir pour trouver en son sein un petit miroir ovale, et lorsqu'elle y plongea le regard, délaissant là l'épais volume, elle fut surprise de voir que deux yeux lui rendaient son œillade. Elle n'avait jamais trop parlé au Travers qui se trouvait de l'autre côté du reflet aussi, elle ne réagit pas à la première pique lancée, se contentant de vouloir reposer le miroir; mais elle n'y parvint pas. Elle était bloquée là, figée à regarder le lion, sans trop savoir quoi dire. « Quatrième allée. Il n'y a personne dans le coin, viens. Et prend le livre! » Sortant de sa poche sa baguette, sans trop y croire, elle se rendit à l'évidence qu'aucun sortilège ne lui serait d'aucun secours quand son finite échoua à la libérer de l'emprise du miroir. Travers la rejoignit tant bien que mal et, se tournant autant que possible vers lui qu'elle sentait à ses côtés sans pouvoir le regarder en face, elle poursuivit. « Je suis persuadée qu'il y a une solution à ce problème dans les livres qui ont hébergé les miroirs, il va nous falloir trouver une façon de les lire. » Attrapant l'épais volume d'une main, elle le mit tout à côté du miroir pour tenter une lecture via sa vision périphérique et elle dut s'avouer que cela ne fonctionner par aussi bien que prévu, même si quelques bouts des phrases lui étaient accessibles. « Tu y arrives ? »

@Lyall Travers

La Serpent ne semblait pas aussi réceptif à ses sarcasmes que certaines personnes qu’il connaissait bien mieux. En tout cas aurait-il essayé de rendre cette situation plus amusante, mais il finit tout simplement par hausser les épaules lorsqu’elle lui donna son emplacement. Pour ne pas attirer les soupçons sur une potentielle ânerie qu’il serait bien capable d’être en train de faire, il fit mine d’être plongé dans la lecture de son bouquin, ce qui lui semblait bien moins honteux que de passer pour un narcisse s’admirant dans un miroir de poche. « T’inquiètes pas pour ça, j’ai pas envie qu’il disparaisse pendant que j’ai le dos tourné. » avait-il dit lorsqu’elle l’avait encouragé à prendre le livre maudit avec lui. Comptant les allées pour ne pas se tromper, il parvint enfin aux côtés de l’autre victime de cette farce qu’il aurait pu trouver plus amusante s’il n’en était pas la cible involontaire. Le sortilège d’Hestia ne fonctionna pas, et Lyall comprenait parfaitement pourquoi, ce genre de blagues n’était jamais « drôle » si elles pouvaient se finir avec un simple Finite Incantatem, c’était des malédictions assez classiques mais diablement efficaces quand on y réfléchissait bien. Comme quoi certains potentiels cancres étaient des génies quand il s’agissait de rivaliser avec Peeves pour faire passer une mauvaise journée à leurs camarades.

Sa camarade lui expliqua alors qu’il y avait, selon elle, forcément une solution à tout ça dans les livres qu’ils avaient, et qu’il fallait trouver un moyen des lire. « Ce qui me semble plus facile à dire qu’à faire. Non pas que je ne sache pas lire, mais, et sans vouloir passer pour un romantique raté, je peux pas trop détourner mon regard du tiens pour l’instant. » Cependant, alors que les derniers mots sortaient de sa bouche, une lueur sembla illuminer son regard, une idée passant à travers son esprit. S’asseyant sur la table sans prendre en considération les chaises, par simple peur et par simplicité au vue de leur situation, il tendit d’une main le livre qu’il avait apporté vers Hestia, ou du moins là où elle était censée être. « Attends, si on se met dos à dos avec les livres ouverts, on devrait voir le reflet du livre de l’autre dans le miroir, non ? »

Bien entendu, cette idée n’était rien de plus qu’une esquisse saugrenue, quelque chose qui ne marcherait probablement pas, tout du moins du premier coup. Il n’était pas dupe mais essayer des choses était mieux que de simplement faire des hypothèses. La simple idée de voir la bibliothèque fermer avant qu’ils n’aient pu se dépêtrer de cette situation ne le réjouissait pas vraiment. « Surtout que je pense que l’idée de passer pour « miss miroir » jusqu’à la fin de l’année ne doit pas plus t’enchanter que moi. » Lâcha-t-il envers sa camarade d’infortune.

Voyant déjà la silhouette de la bibliothécaire au loin, il se ravisa tout de suite et se releva de la table, préférant éviter des ennuis supplémentaires alors qu’ils semblaient déjà en avoir jusqu’au cou. « Passe-moi ton livre, je suppose qu’on doit chacun pouvoir lire le sien et non celui de l’autre, ce serait presque trop simple sinon… » Dit-il avant de soupirer, terminant par un simple. « Y’a que moi qui ai autant envie de féliciter que d’étrangler la personne qui s’est amusé à laisser ça dans les rayons de la bibliothèque ? » Après tout, il valait mieux trouver quelques sujets de discussions s’ils en avaient pour plus longtemps que prévu à devoir se regarder littéralement dans le blanc des yeux.

Elle fulminait quelque peu, à présent, devant l'audace de la plaisanterie dont elle était en train de faire les frais et elle se contenta de hausser les épaules lorsqu'il évoqua leurs regards liés. En temps normal, ce jeu de mots aurait pu la faire sourire, mais en temps normal, elle n'aurait pas été obligée de passer un temps beaucoup trop long avec lui si elle n'en avait pas eu l'envie et surtout, il était nécessaire qu'elle parvienne à s'extraire de ce maléfice avant que la bibliothécaire ou son assistant ne pensent que l'un d'entre eux deux avait ensorcelé des livres dont ils étaient responsables. Elle était convaincue, comme bon nombre des étudiants que la vieille femme préférait les livres aux êtres humains et elle n'avait surtout pas envie de lui donner une occasion de s'en prendre à eux. Elle réfléchit un instant à sa proposition et en premier lieu, la trouva légèrement stupide, vu qu'elle ignorait comment lire à l'envers ou même si cela serait possible, mais faute de mieux, elle soupira et lui dit « On peut toujours essayer. » elle vint s'asseoir près de lui et lui tourna le dos, essayant de faire cela discrètement pour que personne ne puisse constater leur petit manège. Avant d'avoir pu trouver un bon angle, il se releva pour fuir le regard acéré de Madame Pince et elle l'imita, le rejoignant discrètement dans les rayonnages. « Probablement. J'ai juste envie de le retrouver et de lui dire ce que j'en pense.» Elle se sentit s'empourprer à cette idée; il y avait fort à parier qu'elle se serait contentée d'un regard venimeux mais l'outrecuidant sorcier n'aurait probablement pas eu droit à plus de deux mots, l'indifférence étant parfois plus acérée que les mots. Levant le libre à hauteur de ses yeux elle pensa subitement que son plan pouvait fonctionner, et elle espérait que cela ne mettrait pas trop de temps ; il devenait inconfortable de ne pas parvenir à quitter ce regard, même si elle aurait pu tomber sur plus désagréable ou agressif que lui. Cette pensée la rasséréna un peu et elle tenta de lire quelque chose du coin de l'oeil, sans y parvenir. « Tu y arrives? »

@Lyall Travers