Les paupières lourdes de ses mauvaises nuits, le serpentard mangeait avec peu d'entrain. S'il admettait en avoir apprécié les prémices, ce tournoi commençait à l'éreinter. Blaise était plutôt du genre à avoir une unique poussée d'adrénaline lorsque sa piètre motivation se décidait à en finir une bonne fois pour toutes, mais il lui semblait désormais que ces épreuves et surtout l'interminable attente entre elles l'usaient tel une corde fatiguée. Heureusement, ses coéquipiers le complétaient bien question joie de vivre et parvenaient à garder un Zabini actif quoique râleur.

Lorsque le feu follet se manifesta, les quatre élèves s'entraidèrent tant bien que mal pour se remettre en route. Il était beaucoup trop tôt et Zabini eut envie de s'enfouir dans le sol et y rester à jamais - ou en tout cas, jusqu'à une heure acceptable - mais la perspective de devoir tester le champ d'attraction lui fit oublier cette utopie. L'équipe arriva vite au Lac Noir et Blaise put sentir ses poils de bras ainsi que les trois écailles dans son dos se dresser alors qu'il humait la douce humidité environnante. A ses côtés, son coéquipier Ponds eut une réaction inverse : il était livide. Blaise fut pris d'une légère appréhension (quoique la perspective d'y plonger était excitante, malgré la température probablement proche du zéro) à l'idée qu'on lui demanderait peut-être de nager : il était de notoriété publique parmi ses relations qu'il excellait en natation, mais Blaise n'avait pas sur lui son haut de plongée qu'il mettait lors de ses sessions pour cacher ses discrètes excroissances écailleuses. Il était hors de question que son équipe les voie. Distrait, il les caressa de la pulpe des doigts à travers sa chemise.

Blaise poussa un léger soupir lorsque le feu follet pénétra dans une sphère opaque. Lorsqu'ils s'y introduisirent à sa suite, il reconnut bien vite qu'il n'y avait pas de quoi être plus rassuré, mais la pression retomba légèrement quand la couleur de l'esprit s'arrêta sur celle des Gryffondor : au moins, il ne serait pas le premier à passer l'épreuve. Aidan prit la parole.

- Eh bien, c'est une porte, alors j'imagine qu'il faut qu'Edda l'emprunte, lui répondit Blaise d'un ton légèrement abasourdi. Il n'y a pas de poignée, par contre, remarqua-t-il pour lui-même avant se s'adresser à sa binôme. Edda, je pense que tu devrais t'approcher, essayer de toucher la porte pour voir ce qui se passe, par exemple.

Lui s'assit lourdement sur le fauteuil sans plus de cérémonie.

Deux jours s’étaient écoulés depuis la fin de la première épreuve. Deux jours où tu avais appris à connaitre chacun de tes équipiers, tu avais vu en eux de nombreuses valeurs et tu avais pu analyser un peu leurs points forts comme leur point faible. Durant ces deux jours, tu avais aussi passé énormément de temps avec Aidan, ton binôme depuis le début d’année. Il avait progressé et il avait tenu à s’entrainer pour ne pas être un handicap pour son équipe. C’était une bonne idée. Ca avait aussi été l’occasion de pouvoir parler avec peu avec la gryffondor au tempérament de feu, et du serpentard malgré son attitude bien souvent désinvolte.

Une nouvelle journée s’annonçait, deux jours étaient écoulés depuis le début du tournoi et ton groupe et toi êtes parvenus à trouvé une bonne dynamique, quelques habitudes qui allait pouvoir vous être utile pour la vie quotidienne, qui malgré les épreuves représentait 80 pourcents du tournoi. Le tout restait de réussir les épreuves sans trop de dégât. Tu n’étais pourtant pas très enchanté à l’idée d’un tournoi mais maintenant que tu y étais, tu tentais de t’impliquer au maximum. Pour tes coéquipiers. Pour toi aussi, il était hors de question que tu perdes sans avoir tout donné. L’idéal étant de ne pas perdre. Et vous voilà reparti dès à présent pour ce qui allai être votre seconde épreuve, suivant pas à pas le feufolet. Plusieurs élèves croisèrent votre route, visiblement un certain nombre d’équipe et votre route vous menait tous jusqu’au lac, face à d’étranges bulles. Tu avais senti Aidan s’accrocher à toi avec inquiétude en demandant si vous n’alliez pas plongé. Tu voulais le rassurer mais tu n’en savais rien, toutefois il était mauvais d’avoir un camarade anxieux juste avant une épreuve. « Je l'espère. » Avait-tu simplement soufflé. Ca ne le rassurerait pas mais de toute façon il fallait bien y être pour se faire une idée.

Tu avais emboité le pas de Zabini en entrant à ton tour dans la sphère trouble. Tu avais regardé tout autour de toi sans vraiment comprendre ce qui allait vous attendre. Peut-être y aura-t-il de nouveaux indices. Non visiblement rien si ce n’est le feufolet affichant les couleurs de vos maisons. La couleur s’arrêta sur le rouge, symbolisant sans aucun doute gryffondor. Tu ne disais rien mais ton esprit élaborait mille et unes hypothèses. Aidan avait prit la parole mais tu n’avais pas répondu, écoutant d’une oreille discrète Zabini donné une explication. « Je pense que Blaise à raison, nous allons sans doute devoir passer tour à tour. Je n’ai aucune idée de ce qui nous attend derrière mais je suppose que le meilleur moyen de le savoir, c’est d’y aller. Dans tous les cas le feufolet n’est pas devenu rouge par hasard. » Tu restais debout les bras croisé, ton regard fixé sur Edda. Elle devenait l’actrice principale de cette épreuve, alors votre destin visiblement restait entre ses mains.

Ce matin, au petit déjeuner, le stress était palpable. Tu ne sais pas pourquoi, mais t'avais été bien incapable d'avaler quoique ce soit, comme si tu sentais la douille arrivée. Ça faisait quelques jours que le tournoi avait commencé et, donc, que tu avais dû te lier à ton équipe. Tu connaissais déjà Blaise depuis le début d'année, puisqu'il avait été ton binôme attitré, et tu avais découvert en Noe et Aidan des camarades adorables et, surtout, très intéressant. T'avais une bonne équipe, tu le sentais, t'étais heureuse d'être avec eux et pas avec d'autres ; mais, oui, tu stressais. Tous les matins, au réveil, tu avais une boule au ventre, des sueurs froides, et tu te disais que, aujourd'hui, c'était ton dernier jour. Demandez pas pourquoi, même toi t'en avais aucune foutu idée. C'était peut-être ton esprit de compétition qui se réveillait, qui prenait d'la place — toute la place — et qui voulait absolument réussir les épreuves. C'était p'têt aussi ton manque de confiance en toi et ta maladresse légendaire qui faisait que tu étais persuadée, dans un sens, d'être un fardeau pour ton équipe. Oui, p'têt que c'était tout ça.

Vous aviez suivi le feufolet sans trop vous presser, tous curieux de savoir ce qu'il annonçait ou, plutôt, comment allait se traduire cette deuxième épreuve. Un coup d'œil aux alentours sur les autres équipes, avant que vous ne rentriez tous dans cette orbe transparente. Par Merlin, c'est quoi ce délire ? La curiosité avait nettement remplacé le stress, bien que ponctué d'un peu d'appréhension, et tu avais mil question qui te traversait la tête. Tu fixais la porte qui changeait de couleurs de manière aléatoire, cherchant à comprendre ce que tout cela pouvait bien signifier, jusqu'à ce qu'elle s'arrête définitivement sur le rouge.

C'était à toi de briller, uh ?

L'angoisse avait rappliqué très rapidement, là. En écoutant Blaise, t'avais juste envie d'leur gueuler que peut-être qu'ils se trompaient, tous, que c'était simplement la couleur favorite du feufolet, que ça avait aucun foutu rapport avec toi, aucun foutu rapport avec Gryffondor. Mais tu savais qu'ça n'tenait pas debout, évidemment que c'était en rapport avec Gryffondor, évidemment que ça signifiait que tu devais y aller. T'as même pas retenu l'soupire qui s'est échappé d'tes lèvres en arrivant à cette conclusion.

— Bon, eh bien... Un temps d'hésitation, où tu poses ton regard sur chaque membre de l'équipe. C'est le moment ou jamais pour montrer de quoi t'es capable, Edda. Honneur aux dames, j'imagine.

Un haussement d'épaule, avant d't'avancer en direction de la porte rouge. T'as aucune idée d'comment traverser ça mais ça n'devrait pas être trop compliqué, pas vrai ?

Tu te sentais grisée des encouragements d'Aidan. Honnêtement, quand tu avais évoqué la chanson qu'il chantait pour Eloan (chanson que tu avais finis par entonner, toi aussi, heureuse d'encourager la personne qui avait reprit ta place de gardienne de l'équipe des rouges et ors), tu ne t'étais pas imaginé qu'il en ferait une pour toi, un jour. Et ça te rendait heureuse ; confiante, aussi. Alors t'avais eu un sourire aux lèvres en passant finalement la porte, sourire qui avait fané à mesure que tu t'étais avancée le long de l'étroit corridor, jusqu'à la prochaine porte. Le stress, l'angoisse, l'appréhension emplissaient petit à petit tes veines, mais tu ne reculais pas, Ed, non ; tu continuais à avancer, jusqu'à te retrouver face au fameux filet du diable. Chose qui t'angoissa un peu plus. Oh, tu étais loin d'être claustrophobe, et tu avais étudié cette plante en troisième année. Mais il y avait une différence entre étudier une plante, et se retrouver confronté à des racines s'enroulant autour de tes pieds, grimpant petit à petit le long de ton corps, jusqu'à te recouvrir entièrement.

Ça serait mentir que de dire que tu n'avais pas vu ta vie finir, à ce moment-là. Ton souffle s'était fait erratique, ton cœur battait anormalement vite, et t'avais un mal fou à respirer convenablement. T'avais aucun problème d'asthme, aucune angoisse, si on oublie cette peur brûlante de décevoir les gens autour de toi ; pourtant, là, t'as eu peur de tout. Peur de ne pas t'en sortir vivante, peur de ne pas te rappeler de ce que tu avais bien pu étudier, peur de ne pas y arriver, tout court. Alors que tu te retrouves enserré par la plante, tu vois ta vie se finir, ici, maintenant et, par Merlin, tu maudit cet idiot de Dumbledore pour avoir eu une idée aussi grotesque. Ce tournoi aura ta peau, c'est certain. Et là où tu es prête à abandonner, tu te rappelles. Tu te rappelles du visage de Blaise quand il est allé tranquillement s'installer sur un fauteuil pour attendre que tu finisses ta partie de l'épreuve. Tu te rappelles du bref regard que tu as échangé avec Noe, juste avant de t'engouffrer par la porte. Tu te rappelles de la voix (fausse) d'Aidan alors qu'il t'encourageait. Et tu te rappelles, surtout, de tes cours de botanique. Tu n'es pas encore totalement entravé par les plantes, mais tu n'as quand même pas suffisamment de marge de manœuvre pour exécuter le mouvement du poignet qu'il faut pour réaliser ton sort. Alors il faut que tu te détendes, au maximum, afin d'réussir à t'en tirer.
— Calmes toi, Edda, calmes toi...
Ta voix emplit l'espace des plus silencieux, te faisant presque sursauter ; enfin, si tu pouvais bouger. Faut qu'tu l'fasses. Faut que tu te calmes.
edit. Le calme se fait en toi, doucement mais sûrement. Petit à petit, tu sens les racines qui t'entravaient se détacher, tu réussis à bouger ta main, puis ta tête, enfin ton pied, et tu te sens glisser, attirer vers le bas, indéniablement. Aurais-tu vraiment réussi, Edda ? Faut croire. Tu te retrouves un étage plus bas, tombant lamentablement au sol — pardon, t'écrasant comme une bouse d'hyppogriffe au sol — et prends quelques minutes avant d'te relever. Par Merlin, qui eut cru que tu y arriverais, hein ? Certainement pas toi.

Maintenant debout, tu récupères ta baguette qui a roulé un peu après toi, avant de rapidement jeter un Lumos afin de t'éclairer. Tu n'as qu'une direction possible, alors tu longes le mur, une main posée dessus au cas où tu trouves le moindre renfoncement. Pourtant tu dois te rendre à l'évidence, Edda, il n'y a rien, à part ce couloir, et toi. Tu es loin d'être claustrophobe, néanmoins tu n'as pas pour autant envie de rester ici indéfiniment, il va donc bien falloir trouver une solution pour sortir. Tes yeux scrutent la pénombre, et soudainement tu la vois, ta solution. Tu repères d'abord la corde, l'anneau, le crochet. Ensuite, c'est l'échelle qui apparaît sous tes yeux, et un sourire amusé se peint sur ton visage. Deux options, donc. À toi de choisir, pas vrai ?

Tu n'es pas idiote, Edda. Au contraire, tu es plutôt intelligente, et assez scolaire. Mais tu n'es pas que ça. Tu es, aussi et surtout, une Gryffondor, n'est-ce pas ? Et il est largement le temps de prouver que tu appartiens bel et bien à cette maison. La réflexion se fait alors dans ta tête sans même que tu la mettes en place : l'échelle a l'air plutôt bancale, et certes, tu n'es ni apeurée ni empreinte au vertige, pourtant tu es persuadée que ça n'est pas une bonne idée. La corde risque, elle, de te râper les mains, possiblement de t'épuiser un peu plus... Si jamais il y a encore une épreuve derrière, ou même plusieurs épreuves, il faut que tu sois en forme. Le risque de te casser une cheville si tu tombes de l'échelle est réelle, et le risque de fatiguer un peu trop tes muscles en te hissant à la corde l'est aussi. Et il faut bien qu'tu fasses un choix. Alors tu t'étires, étends au maximum tes jambes, tes bras, fais craquer un ou deux os.
— Merlin, t'as intérêt à être avec moi sur ce coup-là. J'refuse d'être une nouvelle source de déception, de qui que ce soit, alors laisse moi réussir cette épreuve, compris ?
Et, enfin, tu t'avances vers la corde. Ton choix est motivé par ton côté sportive ; si tu as été capable de survivre à des tonnes d'échauffements avant de réaliser des matchs de Quidditch des plus éprouvants, tu pourrais survivre à l'exercice du hissage à la corde, pas vrai ?

Te hisser le long du mur est plus compliqué que ce que tu imaginais, néanmoins tu finis par te retrouver de l'autre côté et c'est le principal. Dans ta tête, tu remercie Merlin de t'avoir permis d'y arriver, avant de marcher le long du couloir pour rejoindre l'autre côté. Rapidement, tu te glisses dans le peu de place qui se présente, et te retrouve cette fois face à l'eau. Ton regard passe le long des visages que tu aperçois, reconnaissant vaguement certains élèves ; Susan, avec qui tu avais été lors de la confection de biscuit de noël, ou encore Rigel, chose qui te fend le cœur. Tu es prête à te précipiter pour aller le chercher, les chercher, mais soudain tes yeux s'arrêtent sur le visage d'Aidan et tu te figes. Comment est-ce possible ? Il y a à peine quelques minutes il te chantait son encouragement, comment peut-il être présent ici ? Ni Blaise ni Noe ne l'aurait laissé partir, alors s'il est là, ça veut dire qu'un truc leur est arrivé. Par Merlin, Dumbledore, mais qu'as-tu fait ?

Tu as beau être relativement sportive, tu sais que tu n'auras jamais suffisamment de force pour t'occuper de tes trois amis, et la cuve se remplit, il faut qu'tu fasses un choix Edda. Ton côté Poufsouffle ressort à ce moment-là, et il te paraît évident que l'équipe a trop d'importance pour toi, tu ne peux pas laisser Aidan là. Quant à Rigel et Susan... Tu entends des bruits de pas, leur coéquipier vont probablement arriver bientôt et les sortir de là, ça te paraît évident. Alors tu te dépêches de faire le tour de la salle, récupérant le petit couteau, et coupe les liens qui maintiennent Aidan attaché. Ton sang bat bien trop fort dans tes veines, ton cœur menace d'exploser de ta poitrine, et tu t'y reprends à deux fois avant de réussir à enfin le libérer. Le stress, l'angoisse, la peur ; un flot d'émotion se bouscule en toi et t'empêche de penser correctement. Il faut que tu agisses vite, et bien.

Un instant, alors que tu maintiens le Poufsouffle contre toi, tu te stoppes, regarde à nouveau les corps inconscients de tes amis... T'hésites, Edda. T'as l'impression d'avoir encore le temps, et t'aimerais faire plus que ça. Sortir de là Susan, Rigel, Maeve et Aidan. Goyle, tu t'en fous, il peut bien crever, après la blessure qu'il t'a infligé ; mais les autres... Tu ne peux qu'espérer que leur coéquipier arriveront rapidement. Finalement tu te détournes de la cuve, et hisse Aidan à tes côtés pour sortir de la pièce. Une fois débarrassée de l'eau, tu te sens un peu mieux, un peu moins stressé, et te dépêches de tirer le corps de ton ami le long du couloir. Tu ne t'en rends même pas compte, mais des larmes d'appréhension se mettent à couler le long de tes joues ; tu as peur de ce que tu pourrais bien trouver derrière la porte que tu aperçois. Peur qu'il soit arrivé quelque chose à Noé. Peur que Blaise n'ai pas pu les protéger. Peur d'avoir fait tout ça pour rien, aussi, et d'apprendre, plus tard, que tes amis n'ont pas pu être sauvé.

La porte s'ouvre sous ton poids, et te voilà au sol, Aidan toujours contre toi. Te voilà de retour dans la pièce de laquelle tu es partie, et tu relèves les yeux, les rivant dans ceux de... de Aidan, justement.
— Ai-Aidan...
Ton regard se porte sur ce que tu pensais être ton coéquipier, pour découvrir à sa place une forme marron, que tu reconnais comme étant un sac. Alors tu craques. Tu ne retiens plus les larmes, cette fois, qui s'écoulent sur ton visage dans un flot discontinue.
— J'ai... J'ai cru que... Qu'est-ce que... Merda !
Tu n'retiens pas l'juron, signe du stress qui vient de t'assaillir pendant les quelques minutes qu'ont duré l'épreuve. Par Merlin, mais qu'est-ce qu'il vient de t'arriver ?

Tu ne saurais dire combien de temps s’était écoulé depuis qu’Edda avait franchi cette porte. Tu ne t’inquiétais pas le moins du monde. Votre équipe fonctionnait sur une base de confiance et tu ne doutais pas une seule seconde de la réussite d’Edda. Dans le cas d’un échec tu saurais qu’elle avait tout donné alors tu ne pourrais pas l’en blâmer. Tu t’étais confortablement installé sur l’un des fauteuils à l’instar de Zabini. La tête appuyé contre ton bras, tu avais vu les minutes défilés sous vos yeux sans jamais entrevoir le retour de la rouge et or. Tu aurais pourtant aimé savoir ce qu’il pouvait bien se dérouler derrière cette porte alors tu restais calme, posant parfois tes yeux clairs sur Aidan bien plus inquiet que toi malgré sa confiance en Edda. Il était bien trop soucieux des autres pour rester impassible dans ce genre de situation.

Finalement la porte s’était ouverte sous le poids d’une Edda maintenant au sol. Lentement tu avais levé la tête en sa direction, te levant avec énergie pour la rejoindre. Etrangement tu avais vu une expression de surprise inhabituelle dans son regard lorsqu’elle avait aperçu Aidan avant de craquer et de fondre en larme. Qu’avait-elle bien pu vivre là-bas. Mais tu n’avais pas le temps de te soucier de son état ni de la réconforter. La couleur chaude du feufolet venait à nouveau de changer laissant place à celle des aigles.  « Occupez vous d’elle, c’est à mon tour d’y aller » Tu ne montrais pas la moindre émotion, tu ne savais pas ce qui allait bien t’attendre derrière cette porte et évidemment tu restais sur la réserve. Mais il était hors de question d’en faire part à tes camarades ou de les inquiéter d’une quelconque façon. Alors tu te montrais inexpressif, sans faiblesse tandis que tu traversais la porte sans même un regard en arrière. Puis une seconde porte t’avais fait face que tu traversais aussi.

Tu te retrouvais maintenant dans une immense salle. Tu ne te précipitais pas, prenant le temps d’analyser ce qui te faisait face. Tu repérais en premier lieu un puzzle géant, les pièces semblaient lourdes mais le puzzle assez rapide à réaliser. Il te demanderait tout de même un certain apport de force physique qui pourrait te porter préjudices par la suite. D’autant plus que tu avais de nombreuses chances de te tromper, tu n’affirmais rien mais les pièces semblaient ensemble, reconstituer un ciel noir ou quelque chose dans le genre.  De l’autre côté de la pièce, c’est un casse-tête que l’on te proposait. Relique en bois, rouages, pièces à déplacer. Assez rapidement tu avais élaboré une piste pour le reconstituer. En y réfléchissant bien tu voyais avantage et inconvénient aux deux épreuves. Mais tu te disais que choisir l’épreuve qui te semblait la plus simple au premier abord, demandant d’avantage de force que de réelles réflexions n’étaient sans doute pas le plus avantageux. Peut-être que tu réfléchissais trop mais justement, tu avais l’impression d’être ici pour tester tes capacités de réflexion. Alors tu te dirigeais vers le casse-tête que tu observais afin de chercher une solution pour le résoudre. Tu ne te précipitais pas, gardant tes prunelles polaires rivés sur l’objet qui te faisait face.

Tu déplaçais les pièces de ton casse-tête avec minutie mais assez rapidement tu avais réalisé que tu ne te dirigeais pas dans la bonne direction. Il ne prenait pas la forme souhaité, du moins pas ce qui se rapprochait d’un résultat. Tu inspirais profondément sans céder à la panique, essayant du mieux que tu le pouvais de revenir à zéro. Tu ne devais pas être le seul à buter devant et cela ne serait pas un casse-tête s’il se réalisait aussi facilement. Au contraire tu aimais les défis et celui-ci te motivait d’avantage maintenant que tu commençais à en saisir la complexité.

Te servir de ta tête ne t’étais pas inconnu et tu aurais bien idiot de céder à la panique et de vouloir tout abandonner simplement car tu ne dirigeais pas dans la bonne direction. Ne disait on pas qu’il faut parfois prendre du recul pour cerner la complexité d’un défi à relever. Tu prenais ton temps, ne te précipitais pas et tu choisissais même de reculer de quelques pas pour analyser un peu mieux le casse-tête avec toutes ses subtilités. Main posé sous ton menton, avant de pincer rapidement l’arrête de ton nez le temps de chercher une solution, tu repartais à la charge sans abandonner. Toujours calmement et minutieusement tu suivais le chemin qui te semblait le bon dans la résolution de ce défi de taille.

Et tu prenais une nouvelle fois ce qui te semblait être une mauvaise représentation du casse-tête. Mais que t’arrives t’il Noe ? Tu n’étais pas si mauvais sous la pression habituellement.  Ce n'était même pas ça pourtant. Tu étais habitué à agir sous la compétition et tu n'avais pas la sensation de perde tes moyens. Peut-être que le casse-tête possédait un niveau trop élevé pour le tien. Tu ne pouvais te résigner à ne pas réussir quelque chose et tu ne comptais pas abandonner si facilement. Une nouvelle fois tu prenais du recul pour observer l’objet dans son ensemble. Tu avais la sensation de passer à côté de quelque chose. C'était sûr et certain. « Réfléchis Noe, tu dois bien passer à côté d’une étape. » Tu te parlais à toi-même, élaborant différentes théorie en déplaçant les morceaux du casse tête en t’y reprenant pour la troisième fois. Tu espère qu’elle sera la bonne. Tu tentes du mieux que tu le peux d’agir avec précaution, te montrant bien plus attentif qu’auparavant à chacun de tes déplacements. Tu espérais que ce soit le bon.

Tu restais toujours là, devant ce casse-tête que tu avais recommencé encore et encore. Tu ratais une étape c’était sûr, et si tu ne te laissais pas submerger par le stress, tu n’oubliais pas que le temps s’écoulait et que c’était sans doute une épreuve de vitesse. Peut-être cherchais-tu trop loin. Parfois à trop chercher complexe, on passe à côté des évidences. Tu te reculais à nouveau de quelques pas, reprenant une nouvelle fois. « Alors ça, je pense que ça va là… Ca ici… » Jusque là tout semblait aller bien, tu plissais les yeux. Le début semblait bon, alors où ça bloquait ? Tu manipulais encore et encore les pièces en les déplaçant, les replaçant. Tes pensées fusaient par millier, chaque mouvement te faisait te questionner. Etait-ce le bon ou le mauvais choix. En général tu étais de ceux qui conservait leur première idée, souvent la bonne d’ailleurs. Mais tes échec t’obligeaient à devoir te questionner et réfléchir un peu plus.  Ici, tu te retrouvais mis dans tes derniers retranchements.

Edit: Et t'y mettre à cent pourcent semblait porter ses fruits. Tu réussissais enfin à compléter se foutu casse-tête. Sans hésiter, tu récupérais ton sac, reprenais ton air impassible et tu franchissais cette porte qui te conduisait à tes camarades. "Au suivant."

Quand la lumière annonça ma couleur, que la porte s’ouvrit pour m’annoncer ma nouvelle épreuve, je crus d’abord que j’allais perdre tout courage. Je n’étais pas brave, comme garçon, non… Mais je pouvais me qualifier comme digne Poufsouffle. Peu importait ma peur, de l’échec, de la peur aussi, j’étais loyal à mon quatuor. Ils faisaient tous de leur mieux, alors je ferai de même. Je ne devais pas les tirer vers le bas. Alors, m’accrochant à ma cravate jaune sous mon pull, symbole de mon appartenance aux loyaux, je m’avançai vers ces globes.

Ils étaient beaux. Lumineux. Etait-ce mon épreuve ? Comment quelque chose d’aussi beau pouvait me donner un défi, me mettre en difficulté pour prouver ma valeur ? Je m’avançai vers eux, qui semblaient m’appeler. Il y avait des images dans ces sphères, j’en pris une au hasard pour mieux voir.

Je souris presque immédiatement en me voyant, moi plus petit. C’était étrange, comment j’étais assez frêle, et petit. Je l’étais encore, mais moins, heureusement… Sur ce bateau dont j’avais tant entendu parler, accompagné de d’autres enfants, certains que je connaissais, d’autre pas. Je riais tant j’étais heureux. Je voyais ma jumelle non loin de moi, je n’arrêtais pas de lui faire des signes. Je me souvenais que j’étais si triste ce jour-là, de laisser derrière moi mon petit frère et ma petite sœur, mais je m’étais juré de les accueillir, chacun leur tour, et de les préparer aux merveilles de la vue du château. Je voyais Maeve, aussi, tant de personnes qui marquèrent les années, chacunes à leur façon. Je me souvenais qu’à ce moment-là, je les aimais déjà tous d’exister.

La nostalgie est là, et je prends d’autres globes, à chaque fois, ils me montraient des scènes dont je me souvenais parfois avec clarté, et d’autres que j’avais totalement oubliées, qui me revenaient, qui m’étaient familières. Comme celui-là, ce jour où je tentais encore ce sortilège difficile, pour un examen le lendemain. Je voyais Rory, mon hibou, essayer de m’éviter, car il en avait assez d’être mon cobaye… Alors que je devais juste changer sa couleur. Mais depuis son dégradé de vert… mauvais vert, il avait décidé qu’il en avait eu assez. J’en avais pleuré de rage. Jusqu’à ce qu’Ethel vienne, me sauve. M’aide, et que j’y arrive.

Il y avait aussi ce souvenir où Père m’a dit être fier de moi, parce que j’avais eu des notes exceptionnellement bonnes. On ne les voyait pas sur ces souvenirs, mais j’étais épuisé, durant ces vacances de Noël. J’avais passé tellement d’heure à travailler… Sacrifié trop de choses. J’avais été heureux d’avoir droit à cette marque de fierté, mais ce fut la seule fois que je l’eus. J’avais baissé ensuite, puisque diminué mon temps d’étude pour le journal. J’avais décidé, en mon for intérieur, de donner place à un tout petit peu de rêve.

Je vis aussi cette dispute que vous avions eu, entre Ponds, suite à la bêtise de Nausi’ et Ethel. Ces mots dépassant nos pensées, puis enfin, la réconciliation. Ces câlins partagés, signes de paix à mes yeux. Cette fratrie, qui valait tout à mes yeux, dans les pires comme les meilleurs moments.


Je vis même cette scène que je tentais d’enfouir en moi. Ce baiser, qui déclenchait tellement d’émotions, des papillons dans mon ventre. Je pris un instant pour l’observer. Me voir surpris, puis totalement ahuri. Je ne pus m’empêcher de rire nerveusement. Puis de reposer ce globe, pour attraper un autre, au hasard.

Qui me montra ce dernier Noël. La dispute qui avait éclaté entre ma fratrie et mes parents, tandis que je n’avais fait que fuir. La fuite… Ca avait semblé si simple, sur le moment. Aller ailleurs. Ecrire une lettre à Diane. La même personne qui m’avait vu, au souvenir précédent. Je ne m’attardai pas dessus, fuyant à nouveau. Je me sentais fragilisé par toutes les vérités que ces globes m’envoyaient dans la figure… C’était assez difficile à avaler, il fallait l’avouer.

J’en pris donc encore une, me disant clairement que c’était la dernière.

Pourtant, à peine la vis-je, je fis un arrêt sur image, voyant mes autres camarades manger, sans moi, très complices. Ils mangeaient vraiment vite, se motivant pour au cas où je reviendrais. Je reposai le globe. Je devais réfléchir.

Nous nous entendions bien… Tous. J’avais pu le voir, que nous étions tous proches les uns des autres, solidaires dans cette tâche. Et ils le savaient, comme moi, que nous dépendions tous les uns des autres pour la réussite de tous. Alors pour moi, il ne devait y avoir qu’une seule raison au fait qu’ils se dépêchent tant de manger.

Mon épreuve était de devoir jeûner.

Je repris le globe, mal à l’aise, ne sachant pas combien de temps j’allais devoir me priver de nourriture… Ni c’était bien cela. Je rompis le contact visuel pour observer la pièce. J’avais pu profiter du confort de mes souvenirs, de la chaleur, je me sentais revigoré par cela. Sans doute avaient-ils l’avantage de manger, et moi d’avoir pu me réchauffer un instant après cette nuit frigorifiante ? Cela ne pouvait qu’être ça.

Alors, fixant encore une légère minute le globe, les laissant finir… Je finis par reposer le globe. Et j’entendis une porte s’ouvrir, à nouveau. Nerveux, j’avançai. J’avais l’impression d’être légèrement spolié. J’avais le goût amer dans la bouche… J’avais même la sensation qu’on essayait de semer la zizanie dans mon groupe.

Qu’ils voulaient me pousser à être blessés.

Ils m’avaient fragilisé, je le voyais bien. Ils voulaient que je croie à ces images. Et bien malgré-moi… J’y croyais.

Mais je gardais confiance en eux, en notre objectif.

J’ai foi en vous, les amis.